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CHAPITRE VIII

Au sanctuaire de la Rose-Croix.




Le troisième temple est consacré à Eva, mère du genre humain, maçonniquement canonisée par les Ré-Théurgistes Optimates, quasi-déifiée en quelque sorte. Ce temple a un nom cabalistique ; on le nomme « le Sanctuaire Tiphereth », attendu que Tiphereth, dans le jargon secret des hauts grades palladiques, signifie la beauté, « le principe médiateur entre le créateur et la création. »

Ici, je me trouve arrêté ; car je ne puis, par respect pour le lecteur, donner des explications, ni continuer des descriptions ; le latin même ne saurait être employé. Je me bornerai à dire que la cérémonie consista en un dialogue mimé entre le grand-maître officiant et la dévadase Saoundiroun ; l’assemblée assista à cette pantomime réaliste et satanique, comme à un spectacle ; la séance, au surplus, fut lit de courte durée.

C’est au quatrième temple, dit « Sanctuaire de la Rose-Croix », que m’attendaient les plus vives surprises de cette soirée luciférieinne.

Il n’y a, dans cette salle, aucun autel à l’orient, mais un sépulcre ou vert, d’où sortent des flammes bleuâtres. Derrière ce sépulcre, s’élève, adossée à la muraille du fond, une croix de trois mètres et demi de hauteur sur deux mètres de largeur, dont l’arbre vertical est d’une blancheur de neige, traversant la planche horizontale qui est noire et d’un plan légèrement incliné ; un peu au-dessous du point où l’arbre blanc traverse la planche noire, s’étale une colossale rose rouge, épanouie, dont la tige descend en serpentant jusque dans le sépulcre ouvert, où elle semble avoir sa racine. Le montant perpendiculaire de cette croix est appelé « arbre du Milieu » et symbolise la vie, tandis que la planche horizontale symbolise la mort ; quant au sens emblématique de la rose épanouie, il est impossible, par décence, de l’indiquer. L’arbre du Milieu est surmonté d’une couronne de fer à onze pointes. Enfin, au-dessus de la croix, un immense soleil rayonnant est appliqué à la muraille ; ce soleil et ses rayons sont en or massif ; au centre, en relief et en argent, se détache une tête de jeune homme de vingt ans, aux longs cheveux éparpillés. Les murs de la salle sont recouverts de tentures de velours noir, ornées, en broderie d’argent, de têtes de mort au-dessus de tibias entrecroisés. Le sanctuaire est éclairé par des lampes à onze branches.

Au centre du temple, on remarque, dès qu’on entre, une table ronde, vaste plate-forme en un seul bloc de granit rose, supportée par des pieds