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plus grand nombre dédaignât d’ajouter foi à ses vertus et se défiât de toute ma doctrine. Ainsi, le désigner plus clairement, ce serait éloigner le but que j’aurais de le faire honorer. »

Ce que Saint-Martin n’imprimait pas dans ses livres, il le disait aux adeptes de son rite, minutieusement éprouvés. Son rite appartient à la franc-maçonnerie ; c’est l’Écossisme réformé de Saint-Martin ou Ordre Martiniste ; il a bon nombre de pratiquants en France, mais il est surtout répandu en Allemagne et principalement en Prusse. Primitivement composé de dix grades divisés en deux séries, ce rite, qui est une réforme du régime des Élus-Coëns (de Martinez Pasqualis), a été réduit à sept grades, qui sont : 1er  Apprenti ; 2e Compagnon ; 3e Maitre ; 4e Maître Parfait ; 5e Élu ; 6e Écossais ; 7e Sage Illuminé. C’est au 7e grade que l’adepte sait à quoi s’en tenir sur le grand architecte de l’univers. Mais comme les Martinistes sont des satanistes, ils ne sont pas officiellement reconnus par le Suprême Directoire Dogmatique de la haute-maçonnerie. Néanmoins, quelques-uns d’entre eux sont en rapport avec les chefs du Palladium ; mais ils se gardent bien de le faire savoir à leurs collègues ; on sait, d’ailleurs, que le secret des palladistes est des plus rigoureux.

Il en est de Saint-Martin comme de Swedenborg. Son influence est plutôt une influence générale, et elle se fait sentir aussi bien dans les doctrines des différents groupes d’occultistes que dans l’école spéciale qui marche sous son drapeau. C’est ainsi que Papus, dans un tableau synthétique de la filiation de ces différents groupes, a rattaché à l’école de Saint-Martin, par l’intermédiaire de Wronski : Éliphas Lévi, Louis Lucas, Lacuria, et Stanislas de Guaita, ce dernier comme étant le véritable successeur d’Éliphas Lévi, — qui n’était pourtant pas sataniste.

Une spéciale initiation martiniste a été instituée récemment par le groupe central d’occultisme fondé par Papus, qui semble fonctionner assez activement De temps en temps, l’Initiation offre à ses lecteurs des fragments de discours prononcés à la réception des Frères des différents degrés ; ainsi, par exemple, au 18e volume, page 110 : un Discours prononcé à la réception du Frère 19e au Suprême Conseil, le 25 novembre 1892. L’orateur y définit ce qu’il faut entendre par science martiniste, qu’il résume ainsi : « Expliquer l’univers par l’homme, c’est la devise même de Saint-Martin. » Comme premier mode d’étude, est recommandée la lecture des maîtres martinistes : « Lisez, mon frère, lisez passionnément les œuvres de Martinez Pasqualis et surtout de Saint-Martin… En Saint-Martin est condensée toute la moelle des plus nobles philosophies et des plus hautes religions. Pythagore, Platon et Plotin se retrouvent dans ses pages, l’âme de Jésus a inspiré leur auteur. » L’âme de ces initiations martinistes semble être surtout aujourd’hui Stanislas de Guaita. On verra toutefois, en lisant attentivement le