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révélateur, annonçant que les temps de la vieille église du Christ étaient finis, et que commençait le règne d’un nouveau Christianisme (?), d’une Nouvelle Jérusalem, qu’il était appelé à fonder dans le monde éclairé et régénéré.

C’est cette Nouvelle-Jérusalem qu’ont essayé de fonder après lui et sur le modèle qu’il en a laissé dans ses écrits les petites chapelles satanistes qui se sont établies sous ce nom dans presque toutes les contrées de l’Europe et dans les principales villes des États-Unis d’Amérique.

Je me bornerai à esquisser l’histoire du mouvement swedenborgien en France, où Swedenborg comptait des disciples dès avant 1789. Il est assez curieux de constater que le premier ouvrage de Swedenborg traduit en français : le Ciel et l’Enfer, le fut par le fameux Pernety, bénédictin apostat et diabolisant.

Il est aussi digne de remarque que la France prit une part active à la fondation des premières sociétés on églises swedenborgiennes dans les autres pays. Parmi les membres de la première société fondée en Suède en 1786, se rencontrent deux français, le marquis de Thomé, et Moët, bibliothécaire à Versailles, et traducteur des œuvres de Swedenborg.

Robert Hindmarsh, qui inaugura en 1788 le culte public de la Nouvelle-Jérusalem en Angleterre [1], vit s’adjoindre aussitôt à lui deux français : Servanté, un huguenot du midi de la France, et Bénédict Chastanier [2], un

  1. Il y a aujourd’hui, rien qu’à Londres, douze lieux de culte swedenborgien dans douze quartiers différents.
  2. Pour bien montrer que c’est encore et toujours la franc-maçonnerie qui fait naitre et qui développe ces sectes satanistes, il est utile de rappeler l’œuvre maçonnique de l’apostat Pernety et de Bénédict Chastanier, marchant sur les traces de son digne maitre.
    Pernety, qui, après un premier acte d’insubordination, fut recueilli par Frédéric II de Prusse, le roi haut-maçon, resta auprès de lui plusieurs années. Rentré à Paris, son long séjour auprès du prince hérétique et sectaire et la faveur dont il avait été comblé par lui le rendirent suspect à bon droit. Les auteurs maçonniques disent qu’il fut alors accablé de vexations par l’archevêque de Paris. Ayant quitté la capitale, il vint à Valence, puis à Avignon. Depuis longtemps, il s’occupait d’hermétisme et était affilié aux loges. En Vaucluse, il fonda le rite maçonnique théosophe et hermétique, nommé rite des Illuminés d’Avignon.' C’est dans ce rite qu’il créa le grade cabalistique de Chevalier du Soleil, aujourd’hui 28e degré du Rite Écossais Ancien Accepté.
    Pernety fut aidé dans sa fondation (1778) par un sataniste enragé, le comte de Grabianca grand organisateur de sociétés swedenborgiennes.
    Un Vénérable de la Mère-Loge du Comtat-Venaissin, disciple de Pernety, transporta son rite à Montpellier (1119) et y fonda une Académie des Vrais-Maçons. Cette académie maçonnique se composait des partisans du systéèe de Zinnendorf (rite de la Grande Loge nationale d’Allemagne, à Berlin), de la société des Deux-Aigles, de celle de l’Apocalypse, des Illuminés du Zodiaque, des Frères Noirs (maçons satanistes déclarés) et des Élus-Coëns (rite cabalistique créé par Martinez Pasqualis). Cette académie pratiquait six grades : 1er, Vrai-Macon : 2e, Vrai-Maçon dans la Voie Droite ; 3e, Chevalier de la Clef d’Or ; 4e, Chevalier de l’Iris ; 5e, Chevalier des Argonautes ; 6e, Chevalier de la Toison d’Or. Les rituels des 1er, 2e et 4e grades avaient été fabriqués par Pernety.
    Quant à Bénédict Chastanier, autre disciple de Pernety, il était Vénérable d’une des loges de Paris en 1766 ; à Londres, il établit l’année suivante, une société secrète dont le but était de propager le système de Swedenborg. Plus tard, il fonda (1783) le rite des Illuminés Théosophes, dérivant de celui de Pernety et ayant six grades : 1er, Apprenti-Théosophe : 2e, Compagnon-Théosophe ; 3e, Maître-Théosophe : 4e, Écossais Sublime de la Jérusalem Céleste ou Théosophe Illuminé ; 5e, Frère Bleu ; 6e, Frère Rouge.