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cédant à l’attrait du merveilleux, défigurent dans leurs récits les expériences faites sur des systèmes nerveux exceptionnellement impressionnables, et les assimilent, en les amplifiant au-delà de toute vérité, aux opérations magiques, dont je n’ai point à discuter la réalité, voulant rester absolument étranger à ce genre de question et, par suite, ne point être compté parmi les personnes qui se sont acquis de la notoriété dans les actes dont vous faites l’histoire.

« Quand j’ai cité les cas d’envoûtement que vous reproduisez d’après une de mes brochures, j’ai eu soin de dire, de la façon la plus expresse, que je me bornais à constater la persistance d’une tradition, sans rien préjuger sur la réalité des faits.

« De plus, le compte-rendu que vous donnez, à la page 247 de votre livre, d’une séance qui se serait passée chez moi, est complètement inexact ; celui que vous empruntez à M. Horace Blanchon (page 285 du même livre) se rapprocherait davantage de la réalité. On ne réussit à projeter hors du corps l’effluve, dont le rôle est de faire remonter jusqu’aux centres nerveux les sensations tactiles, qu’en agissant à courte distance sur des sujets présentant des aptitudes spéciales et longuement préparés ; ce qui est tout à fait différent que d’opérer, ex-abrupto, sur la première personne venue, et ce qui constitue un phénomène en somme beaucoup moins merveilleux que le phonographe, l’illumination des ampoules de Tezla, et tant d’autres découvertes contemporaines.

« Veuillez agréer, Monsieur, l’expression de ma considération distinguée.

« Albert de Rochas. »
M. le comte de Larmandie

Il est question de M. le comte de Larmandie, dans le second volume (pages 684-689,) à propos de la Rose-Croix du sâr Péladan. M. de Larmandie ne conteste pas l’exactitude des citations qui ont été faites de son livre Eôraka ; mais il proteste avec la dernière énergie contre l’épithète de « sataniste ». C’est exactement ce qui est dit dans les pages qui le concernent. Il nie, d’autre part, l’incident des poignards tirés pendant une messe à Notre-Dame : il reconnait, toutefois, que cet épisode, qu’il qualifie de conte, a été relaté, le lendemain de cette fameuse messe, dans les journaux les plus répandus, tels que le Figaro, le Gaulois, etc. ; mais, franchement, j’avoue n’avoir lu, à l’époque, aucune protestation de M. Péladan ni de ses amis.

Nous avons reçu, un de mes collaborateurs à la Revue mensuelle et moi, la visite de M. le comte de Larmandie. Sa protestation, verbale, nous a paru de la plus grande sincérité. Nous lui avons fait nos objections, en lui rappelant que lui-même, dans son livre, disait que la Rose-Croix dont il est adepte « n’est contraire ni à l’orthodoxie catholique ni à l’orthodoxie magique » ; et il nous est impossible de voir comment on concilierait ces deux orthodoxies-là.

En somme, notre opinion est que M. de Larmandie, d’ailleurs personnellement sympathique, est de la plus entière bonne foi dans son erreur ; comme Mlle Vaughan chez les palladistes, comme M. Doinel chez les gnostiques valentiniens, il est un de ces honnêtes aveugles dont le diable s’empare à leur insu pour en faire un paravent marquant le satanisme complet des autres. Nous n’en voulons pour preuve qu’une conférence faite par M. de Larmandie à Neuvic (Dordogne) en 1881, et dont il nous a remis la brochure ; nous avons lu ce discours, flétrissant le gouvernement expulseur des religieux ; il est irréprochable, et, qui plus est, très courageux. Aussi, nous ne saurions trop recommander M. de Larmandie aux prières de nos amis, afin qu’il comprenne bien, par la grâce de Dieu, que vouloir mêler à l’orthodoxie catholique une orthodoxie magique quelconque, c’est tomber dans la pire des hérésies.

J’ai offert à M. le comte de Larmandie de lui insérer ici une lettre de réclamation. Voici sa lettre :

« Paris, le 15 octobre 1894.
« Monsieur,

« Je dois protester avec la plus grande énergie contre la qualité de sataniste qui m’est attribuée dans votre fascicule d’août dernier. Je suis catholique pratiquant et militant ; la Rose+Croix à laquelle j’appartiens est une Rose+Croix catholique, une association fondée dans un but de réaction idéaliste et de guerre contre le matérialisme.

« À ce propos, je démens catégoriquement la fable ridicule publiée dans certains journaux, lors de notre première exposition artistique. On nous accusait d’avoir élevé nos poignards, au cours d’une messe entendue à Notre-Dame. Nous n’avons ni poignards ni aucun engin de cette espèce ; le matin qui précéda le vernissage de notre première exposition, nous assistâmes simplement à la messe, pour faire manifestement acte de catholiques.

« Recevez, Monsieur le Directeur, l’assurance de ma considération distinguée.

« Cte de Larmandie,
« 1, rue de Narbonne. »
Mademoiselle Diana Vaughan

La réclamation de l’ex-grande-maîtresse de New-York est antérieure à sa démission ; elle date d’août 1893, c’est-à-dire de l’époque où, venue en Europe comme déléguée d’une des provinces triangulaires des États-Unis, elle traversait la France pour se rendre au convent souverain du palais Borghèse.

Miss Vaughan s’était procuré, à Paris, le 9e fascicule de mon ouvrage. Nous sommes