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il est vrai, un tableau aussi complet, aussi précis que celui que je viens de reproduire ; toutefois, quand on rapproche les unes des autres les constatations des réponses données par les diables possesseurs dans les procès-verbaux d’exorcisations, on reconnait que tous ces démons se sont manifestés et ont indiqué, pour faire valoir leur puissance, précisément les nombres de légions relatés par le livre sacré luciférien. En glanant et réunissant les informations (basées sur des aveux démoniaques en affaires de possession) de Bodin, de Jean Wier ; de dom Calmet, de Collin de Plancy, de l’abbé Migne, on arrive exactement, sauf une seule exception, aux chiffres palladistes. Muni de mes notes prises sur le livre Apadno, j’ai pointé les renseignements des auteurs catholiques ; eh bien, tout concorde, excepté pour Sialul, stratège de l’aile gauche. Ce Sialul n’est mentionné par aucun démonographe chrétien ; en revanche, on le trouve dans Albert Pike et dans Éliphas Lévi : ce dernier le cite comme génie de la prospérité, daimon de la septième heure ; Albert Pike, à la légende luciférienne qui prétend que Baal-Zéboub a connu Saraï et est le père d’Isaac, montre Sialul arrêtant le bras d’Abraham et plus loin l’appelle commandant de 20 légions. Or, ce nombre de 20 légions complète les chiffres relevés dans les démonographes chrétiens, pour arriver au total de 3.666 (armée principale). Ceci me parait significatif. Je dois aussi faire une remarque pour Kakapoiïto ; ce démon ne figure pas dans les constatations des démonographes chrétiens, du moins sous ce nom. Mais je trouve Yen-Vang, commandant à 333 légions, et on l’appelle le chef des diables opérant en Chine. D’autre part, dans les révélations palladiques, Kakapoïto est également qualifié de « Glorieux d’Asie » et « prince Yen-Vang », commandant à 333 légions. Il n’y a donc pas d’erreur ; c’est bien le même.

Les titres de noblesse que Lucifer accorde à certains daimons et daimones sont indépendants des grades de commandement ; ils sont conférés pour récompenser la vaillance, pour conserver la mémoire de grands exploits. C’est ainsi qu’on trouve des duchesses et même des princes parmi les chefs de légion, ne commandant qu’à 6.666 diables. Je me suis servi des termes usités parmi les hommes, afin de ne pas ahurir le lecteur par des mots dont il ne découvrirait pas le sens. Disons toutefois que, dans le langage diabolique, un Séraltern équivaut à un prince, un Prestgraalpich à un archiduc, un Graalpich à un duc, un Colasdor à un marquis, un Piouffmaël à un comte, un Bolak à un baron ; ce sont là les titres réels de la cour infernale. L’application du titre à une daimone s’indique par un redoublement de l’initiale : Sséraltern, Ppresigraalpich, etc. Au contraire, l’application à un insexuel (des frétillants de Béhémoth) s’indique par un redoublement de la finale : Séralternn, Prestgraalpichh, etc. Albert Pike, dans Le Livre des Révélations, consacre tout un chapitre à une sorte de grammaire de la « langue