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combattent de toute éternité, c’est une façon de parler. Strictement, ils sont éternels l’un et l’autre et de toute éternité ennemis ; mais les hostilités violentes n’ont éclaté qu’à l’époque indiquée par le livre Apadno. De même, lors de l’irrémédiable défaite d’Adonaï, celui-ci ne sera pas détruit, — Lucifer daigne reconnaître que cela n’est pas en son pouvoir, — mais enchainé à jamais et mis une fois pour toutes dans l’impossibilité absolue de recommencer à faire le mal. J’aurai, d’ailleurs, à reparler de tout cela, au chapitre de l’Antéchrist.

Pour le moment, occupons-nous seulement de la hiérarchie luciférienne, des armées du prétendu Dieu-Bon, de leur composition et de leur manière de combattre.

En palladisme, on appelle daimons, — ou daimones, puisqu’il y a les deux sexes chez messire Satanas, — les diables qui font partie de l’armée organisée. C’est uniquement de ces diables-là qu’on entend parler quand on dit qu’ils sont au nombre de 44.435.633. Il y a aussi onze milliards de lutins et lutines, menus diablotins, poussière de diables, et deux cents milliards d’humains trépassés, devenus élus du Dieu-Bon à divers degrés, selon leurs mérites, sans compter les élus ayant vécu en de nombreux astres.

Pour justifier ce nombre d’élus (catholiques, nous dirions : de damnés), les théologiens lucifériens partent du raisonnement, du reste, fort inexact, que voici :

— Les adonaites, disent-ils, sont obligés de reconnaître que le catholicisme romain, hors duquel ils nient le salut, ne compte que deux cent dix millions d’adeptes, sur un milliard quatre cents millions d’habitants du globe terrestre ; et encore avouent-ils que, sur cette quantité si restreinte de leurs adeptes, le nombre des élus admis au ciel de leur dieu est infime. Beaucoup d’appelés, peu d’élus, tel est l’aveu de l’Église catholique romaine. D’autre part, il faut reconnaître que des civilisations ont existé sur la terre et ont prospéré, en dehors de la connaissance des rédacteurs de la Bible, laquelle ne voit pour ainsi dire que le peuple juif et les nations en rapport avec lui ; les premiers théologiens de l’adonaïsme n’ont pas seulement soupçonné l’existence des races jaune et rouge de la Chine et des deux Amériques. Ajoutez à cela les constantes découvertes archéologiques, qui témoignent que notre planète a été colossalement peuplée en des temps immémoriaux, que des continents ont disparu, etc. Tenez compte de la moyenne de la vie humaine, et vous verrez qu’on peut aisément, pour faire un calcul de parfait équilibre, évaluer à quatre milliards par siècle, au minimum, les humains qui passent et ont passé de vie à trépas, en dehors du catholicisme romain ; soit, deux cents milliards en chiffres ronds.

Quant à la justification des onze milliards de lutins et lutines, nous allons