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Society, dont il était président, dit « qu’il avait jugé indigne de lui d’invoquer, en témoignage de sa fidélité aux lois, un Dieu qu’il se refusait à adorer. »

En cette année-là un congrès anarchiste se tint en Suisse, et Kropotkine y proposa d’abandonner le terme collectivisme pour prendre celui de communisme anarchiste. En effet, jusqu’alors les disciples de Bakounine seuls s’étaient servis du premier terme ; mais, depuis quelque temps plusieurs révolutionnaires de l’école de Karl Marx s’étaient mis à l’appliquer à leur système ; or, les anarchistes ne voulaient pas être confondus avec ceux-ci. Kropotkine invita également le congrès à se préoccuper d’organiser la propagande dans les campagnes ; car, disait-il, la Révolution sera vaincue, si les ouvriers des villes n’ont pas l’appui des paysans.

La conspiration nihiliste continue plus que jamais en Russie. Le 13 mars 1881, à Saint-Pétersbourg, le tsar Alexandre II est tué en plein jour par l’explosion d’une bombe de dynamite. Tous les gouvernements et presque tous les parlements témoignent leurs sentiments d’horreur de ce crime et leurs sympathies pour la victime, dont le règne avait été marqué par de grandes réformes intérieures, surtout au profit des humbles classes rurales. Cinq des assassins, parmi lesquels deux femmes, peuvent être arrêtés ; devant la chambre des procès politiques du Sénat, assistée de représentants de la noblesse, de la bourgeoisie et des paysans, les criminels se proclament anarchistes ; condamnés à mort, ils sont exécutés, sauf une des femmes, le 15 avril.

En Allemagne, le crime des nihilistes russes est publiquement glorifié par Most et Hasselmann, députés au Reichstag ; le résultat de ces apologies cyniques est que l’assemblée, sur la proposition du grand catholique Windthorst, vote une loi ayant pour objet l’extradition des assassins politiques : des mesures de rigueur sont prises aussi contre les socialistes révolutionnaires du pays.

Au royaume britannique, la situation s’aggrave. Un procès contre l’agitateur Parnell n’ayant pas abouti, le gouvernement est obligé de prendre des précautions militaires, par crainte de quelques tentatives des fenians, non seulement en Irlande, mais même en Angleterre ; le parlement vote un bill pour protéger la vie et la propriété ; las chefs de la Ligue agraire sont arrêtés, mais les lattes sanglantes se renouvellent et les crimes se multiplient. À Londres même, on découvre un complot, dont le but était de faire sauter la résidence du lord-maire ; on saisit, sur un navire venant de la Nouvelle-Orléans, une quantité considérable de substances explosibles envoyées par les anarchistes américains à leurs frères anglais. Le fameux Most, qui avait quitté Berlin après y avoir fait l’apologie de l’assassinat du tsar, débarque en Angleterre, imprime à Londres son journal incendiaire le Fretheit ; mais il