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relatés ?… Mais il ne s’agit pas de gagner un premier prix au concours du merveilleux ; ce livre est une œuvre d’examen et de classification. Quelle que soit la ressemblance, au point de vue de la foi chrétienne, entre les opérations dites de grand-rite et les évocations et apparitions des triangles, ces sortilèges sont tout-à-fait distincts aux yeux de nos palladistes. Dès lors, une division s’impose, sauf à déclarer hautement à ces aveugles que là encore ils sont dans l’erreur.

Leur distinction, la voici :

Dans le premier cas, celui que nous venons d’examiner, c’est l’humain élu qui produit (qui est censé produire, dira le catholique) le fait merveilleux : prédestiné ou ayant un pacte de premier ordre, il est lui-même l’auteur d’actes surnaturels ; étant en état de pénétration, c’est son corps qui s’affranchit des lois naturelles, qui est en extase jusqu’au ravissement, qui se fluidifie, ou même qui se transforme en une série étrange de métamorphoses visibles.

Dans le second cas, il y a également production d’actes surnaturels ; mais c’est l’esprit du feu qui intervient en personne par l’effet de l’évocation, c’est le « daimon » appelé et apparaissant qui opère. Si ce n’est pas un « daimon », c’est-à-dire un des génies de lumière appartenant à l’armée de Lucifer, c’est du moins un trépassé, réuni au Dieu-Bon grâce aux mérites de sa vie humaine.

Telle est la thèse palladiste. Pour nous, enfants de l’Église, toutes ces jongleries sont à mettre dans le même sac : œuvres de grand-rite opérées par des élus vivants et pénétrés, ou bien apparitions d’esprit du feu ou de lucifériens défunts évoqués, tout cela n’est que fantasmagorie diabolique ; les damnés trépassés, pas plus que les voués à Satan vivants, n’opèrent eux-mêmes, et c’est le diable seul qui agit dans tous les cas.

Mais il importait de classer ces prestiges en deux catégories distinctes, puisque les palladistes en font deux sortes d’opérations différentes.

Or, dans les triangles, les apparitions par l’effet d’évocations sont le banal, la monnaie courante du Palladisme ; le lecteur en connait déjà un nombre suffisant, pour que je n’insiste pas. La plupart des épisodes de ma première exploration dans les antres de l’occultisme auraient pu être réservés pour ce chapitre-ci. Relater, un par un, tous les autres faits extraordinaires, du même acabit, dont j’ai été le témoin ou qui m’ont été rapportés, ce serait lasser le lecteur ; car toutes ces apparitions se ressemblent, la varièté est seule dans les diables qui se manifestent sous le nom d’esprits du feu, ou en empruntant les apparences des personnages demandés par les évocateurs.

Il y a donc une monotonie dans les phénomènes d’apparitions, même les plus invraisemblables, comme il y a une monotonie dans les phénomènes de tables tournantes : ici, c’est toujours la même chose, quoique la table change