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au lieu de venir toucher terre, il s’arrêta à un mètre du sol, et se mit à tourner, en s’agitant et faisant tinter ses piécettes, autour de Diana, qui maintenant avait les deux genoux ployés, mais les pieds seuls reposant sur la dalle, tout le corps étant couché, la tête ni le dos n’appuyant nulle part, les mains croisées sur la poitrine au signe du Bon-Pasteur.

Alors, dans cette position, elle inclina la tête sur l’épaule droite et regarda ceux de l’assistance qui étaient de ce côté ; elle avait un regard qui n’était plus humain, mais d’une douceur infinie. L’extase commençait.

Ses pieds quittèrent le sol, pour se mettre au niveau du reste du corps, et elle était ainsi couchée dans le vide, à présent complètement étendue. Le tambour de basque, comme un papillon magique, continuait à tourner autour d’elle en s’agitant.

Mais voici que, conservant sa position horizontale, Diana s’éleva lentement, accompagnée dans son mouvement ascensionnel par le tambour tournant, voltigeant et tintant. Et pendant qu’elle montait, montait, nous entendîmes comme un concert mélodieux de voix de sirènes invisibles, qui chantaient des paroles n’appartenant à aucune langue.

Tout s’arrêta, lorsque l’extatique fut parvenue à quelque distance du plafond. Le tambour vint de lui-même se placer sous sa tête, à l’instar d’un oreiller. Une vive lumière environnait là-haut miss Vaughan. Chose curieuse, sa robe ne pendait pas ; on eût dit que corps et vêtement étaient tout d’un seul bloc.

Elle demeura ainsi immobile, suspendue en l’air, près d’un quart d’heure. Le silence n’était interrompu, de temps en temps, que par des grondements de tonnerre, toujours au loin.

Puis, elle redescendit, avec la même lenteur que pendant l’ascension, et, arrivée à moitié chemin, elle demeura encore un quart d’heure à cette place.

Beaucoup ne pouvaient en croire leurs yeux. Enfin, doucement, doucement encore, son corps prit la position verticale, la tête en bas, sans que ses jupes retombassent en retroussis. Elle tourna ainsi sur elle-même : nous la vîmes bientôt comme couchée sur le ventre, puis reprenant la position verticale, mais cette fois les pieds dirigés vers le sol ; et finalement, ayant les yeux grands ouverts et fixes, le corps gardant l’attitude debout, elle reprit son tambour de basque de la main gauche, tandis que de la main droite elle saisissait la rose rouge placée d’abord au corsage, humait la fleur voluptueusement, et, la respirant ainsi, elle descendit tout à fait.

Elle était debout comme nous tous, ses pieds en contact avec la dalle sur laquelle elle avait tout à l’heure fléchi le genou ; ses yeux revinrent au regard naturel ; elle les frotta, comme en s’éveillant d’un délicieux songe, embrassa l’étoile d’argent de son tambour, et nous dit, d’une voix tranquille :