Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 2.djvu/323

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

toutes les portes des arrière-loges s’ouvrent, ou alors on ne devrait plus recevoir aucun visiteur étranger ; mesure que le chef suprême n’adoptera jamais, car il ne pourrait plus lui-même faire espionner à sa guise les ateliers. Bien mieux, on m’a cité récemment un missionnaire qui a pu visiter, à la suite de mes révélations, divers triangles d’un pays hors de l’Europe, qui a réussi à assister à des tenues dans certains ateliers même où j’étais allé, et qui a constaté la parfaite exactitude de nombreux détails que j’avais publiés. On voit par là que la maçonnerie ne peut plus, à présent, défendre l’accès de ses mystères.

Or, moi-même, entre le Convent secret du palais Borghèse et la venue de miss Vaughan à Paris, j’ai pu pénétrer dans un triangle non-français ; et miss fut bien étonnée, quand, à son récit du prestige de Mammoth Cave, je répondis en lui narrant une séance postérieure, dont elle avait eu les honneurs et où j’avais été assistant, témoin oculaire.

Voici donc ce qui se passa :

C’était dans un triangle des plus fanatiques sous le rapport de la croyance en Lucifer ; au point de vue de l’approbation à donner à la révolte des hauts-maçons américains contre Lemmi, on y était hésitant. Carducci, Bovio, Hobbs, avaient envoyé des lettres pour assurer qu’au Convent secret tout s’était passé très régulièrement ; Findel avait écrit qu’il fallait s’incliner devant le fait accompli ; Goblet d’Alviella avait fait connaitre son opinion en tout favorable au « très puissant et si sympathique F∴ Adriano Lemmi ». Le grand-maître de ce triangle, ébranlé, était cependant dans les meilleurs termes avec les défenseurs de la cause de Charleston. Quelques palladistes de l’endroit insinuèrent que, rien ne se faisant dans le Palladisme sans la volonté du Dieu-Bon, le refus de reconnaitre l’élection du 20 septembre 1893 pouvait entrainer de graves conséquences, en ce qui concernait les opérations magiques du triangle.

— Que voulez-vous dire ? s’écria Palacios, qui avait accompagné miss Vaughan à cette réunion, où tous étaient venus recueillir des adhésions très précieuses pour leur campagne antilemmiste.

— Nous voulons dire, répondit-on, que, si le Dieu-Bon est vraiment avec le grand-maître de Rome, comme il l’affirme, combattre son élection ne sera pas le moyen de nous attirer les faveurs divines.

— Mais le Dieu-Bon se s’est pas retiré de nous ! s’exclama la grande-maitresse de New-York.

Et voilà pourquoi ils tergiversaient, pourquoi ils hésitaient à adhérer à la voûte de protestation : ils craignaient de recevoir des horions, à la première tenue hermétique ; ils redoutaient de voir les esprits du feu cesser de les protéger et les livrer aux violences des maléachs. Le lecteur n’a pas oublié que, dans la superstition luciférienne, on qualifie de maléachs les démons,