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façon aussi inexplicable qu’il avait effectué tout à l’heure son apparition ; il était rentré dans la boîte, sans que l’œil ait pu surprendre un écartement dans le métal. Il y avait cependant un point, ligne ou cercle, qui s’ouvrait et se refermait instantanément. Ce mécanisme était prodigieusement bien réglé et fonctionnait sans livrer aucunement le secret du constructeur. Or, me disait ce F∴ genevois, c’est justement l’acier qui par son poli se prête le mieux à dissimuler les jointures. En effet, dans le prestige de Mlle Walder, quand le mur est revêtu des diverses plaques que les frères servants y vissent, il semble avoir un blindage d’une seule pièce. N’y a-t-il pas, quelque part, à l’endroit même contre lequel Sophia adossée s’appuie, une partie qui s’ouvre et se referme instantanément, lors de l’assourdissant coup de cloche ?

La critique des incrédules s’attaque aussi à l’emploi de la lumière oxhydrique, dont l’effet est de fatiguer les yeux des assistants, tout le temps fixés sur un même espace limité au corps nu de l’opérante et seul vivement éclairé, avec une sorte de titillation continue des appareils projecteurs. Il se pourrait, dit-on, qu’à la faveur de cette titillation, agaçante pour les spectateurs, l’aide-physicien, churgé de la projection et ayant un appareil ad hoc, y fit passer, comme en une lanterne magique, des verres à teintes insensiblement graduées, donnant au corps immobile et éclairé cette pâleur progressive qui le fait peu à peu paraitre cadavre exsangue, puis jaunâtre. Enfin, on met également sur le compte d’un effet de lumière combinée le remplacement insensible du cadavre par la forme spectrale, et l’on dit qu’au moment où les assistants n’ont plus devant eux qu’un fantôme, Mlle Walder est déjà dans le mur ; alors, le fantôme serait produit, comme on le fait pour les spectres visibles, mais impalpables, sur la scène de l’Opéra. Le coup de cloche, tout en surprenant les spectateurs, donnerait le signal, au projecteur de l’ouest, d’interrompre sa manœuvre de verres gradués, et à celui de l’est, de commencer la sienne, en sens inverse. Sur ces verres serait la photographie de Sophia, nue, exactement dans la pose immobile qu’elle a adoptée et qu’elle ne varie jamais d’une séance à l’autre.

Voilà les remarques critiques de ceux qui croient à un tour de passe-passe. S’ils sont dans le vrai, il faut admettre que les compères nécessaires doivent être assez nombreux : le Hiérarque sonneur, les deux aides-physiciens chargés des projections, les frères servants qui vissent les plaques d’acier et qui ont à prendre garde à ne pas se tromper d’une pièce en procédant au blindage du mur ; il faut encore, alors, compter comme compères ceux des assistants qui se placent à droite et à gauche de Sophia, à niveau du mur ; car les spectateurs d’en face peuvent être, à la rigueur, le jouet d’une illusion d’optique, mais non ceux qui sont tout à fait sur les côtés. Il faut aussi des compères dans la construction du mur d’expérience, attendu