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être citées, servent de lieu de réunion à des amateurs de cor de chasse ; grâce à la nature du sol, le dessous de la maison est creusé et solidement édifié, à d’étonnantes profondeurs ; un escalier en spirale permet de descendre à deux ou trois étages en bas, et là les sonneurs de trompe peuvent s’en donner à cœur-joie, tout le soir, sans réveiller les voisins. Au temple secret de la rue du Champ d’Asile, on n’a pas eu besoin d’édifier ; il a suffi de profiter telle partie des catacombes ; un mur de séparation, établi à une assez grande distance, sous terre, forme comme une enceinte qui rend inaccessible aux visiteurs ordinaires la superficie réservée aux dépendances de l’immeuble maçonnique ; il leur est même impossible de se douter qu’au delà de cette muraille il y a en quelque sorte des catacombes privées.

Là, donc, nos francs-maçons occultistes opèrent en toute sécurité. En premier lieu, leurs réunions commençant à huit heures et demie du soir au plus tôt, personne ne les voit entrer en cet asile si habilement dérobé à la curiosité publique ; en second lieu, une fois descendus dans leur deuxième sous-sol, ils peuvent s’y livrer à toutes leurs pratiques, sans craindre qu’aucun bruit ne trahisse leurs mystères[1].

C’est pourquoi, lorsqu’en 1891 Mlle  Walder donna, en cette retraite ingénieuse, ses séances de fluidification, on n’eut que l’embarras du choix, parmi les salles souterraines, pour en disposer une comme il fallait.

  1. J’avais l’intention de publier les adresses des locaux servant à Paris aux réunions des palladistes et autres occultistes, surtout après que M. Georges Bois (de la Vérité) me porta un défi à ce sujet, en niant, d’une part, ces réunions, et en affirmant, d’autre part, que les vrais satanistes n’étaient pas ceux dont je me suis occupé : M. Bois, on s’en souvient, ajoutait que les vrais satanistes parisiens avaient dans le quartier Saint-Sulpice, vingt-deux chapelles secrètes où se dirait la messe noire. Mais plusieurs conseillers prudents m’ont vivement engagé à abandonner ce projet, en me faisant observer que le défi de M. Georges Bois cachait sans aucun doute un piège ; car M. Bois, qui me sommait en quelque sorte de faire la publication précise des locaux d’occultisme à ma connaissance, c’est-à-dire d’imprimer les noms des rues avec le numéro des immeubles, se gardait bien d’en faire autant pour les prétendues chapelles secrètes dont il parlait. En effet, étant donné que j’ai décrit dans cet ouvrage les scènes horribles qui se passent d’ordinaire dans les antres du palladisme et que j’en ai montré toute l’immoralité et vu aussi la résolution prise dans le Convent de Paris de septembre 1894 de poursuivre en diffamation les publications catholiques démasquant la franc-maçonnerie et les francs-maçons toutes les fois qu’elles pourraient tomber sous le coup de notre loi imparfaite, laquelle n’autorise pas la preuve des faits allégués, il est plus que probable qu’en donnant les numéros des maisons, nous nous ferions, mes éditeurs et moi, intenter, par les propriétaires d’immeubles abritant ces honteuses pratiques, des procès d’avance perdus pour nous. Ce serait donc, de notre part, une naïveté de publier nos adresses, quand M. Georges Bois, pour une autre cause, sinon pour celle-là, ne publie pas les siennes.
    Toutefois, voici quelques indications, dans la mesure du possible :
    L’hôtel du Grand Orient de France n’abrite pas de réunions palladistes ; mais il n’en est pas de même de l’immeuble où se trouve le siège du Suprême Conseil du Rite Écossais, rue Rochechouart. La Mère-Loge le Lotus de France, Suisse et Belgique a ses tenues administratives rue Saint-Antoine et ses tenues expérimentales et liturgiques dans un immeuble particulier, tout près du couvent du Sacré-Cœur et dans l’îlot même de maisons où est l’Archevêché ; l’entrée est rue de Varennes. Un triangle sous-loue à certains jours, pour ses réunions au 1er  degré masculin, une salle, rue Payenne ; mais ses réunions androgynes ont lieu aux trois S. Un autre triangle reçoit l’hospitalité d’une secte d’occultistes, qui est loin d’être mal vue par le Grand Orient de France, les Théophilantropes : ce temple est situé rue Croix-Nivert. Enfin, dans la petite rue de la Huchette, se trouve un des antres secrets du satanisme le plus honteux, le plus avilissant ; les initiés le désignent sous le simple nom de « Caveau ».