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Je le répète, l’hystérie est du domaine médical, et la possession est du domaine de l’Église. Mais, quoiqu’il en soit, ce qui est capital en l’espèce, c’est que, chez hystériques comme chez possédés, la maladie ou l’état extra-naturel se manifestent toujours par des symptômes extraordinaires, une expression phénoménale spéciale, bruyante, hurlante, tapageuse, par exemple, qui appelle l’attention, met en éveil, et soumet le cas à l’examen et à l’appréciation. On peut se tromper sur ce qu’il y a ; mais sûrement il y a quelque chose : naturel ou surnaturel. L’hystérie ainsi que la possession ont une forme, un modus agendi. Chez le possédé à l’état latent, rien de tout cela. Il est calme, absolument calme, comme vous et moi. Pas de crises, pas de symptomatologie ; il n’est ni malade, ni indisposé ; il vit de la vie de tous et n’apparaît possédé que, lorsque, se mettant de sa propre volonté en état de crises, il commet ou peut commettre, grâce au démon qui est en lui, à l’état latent, des actes extraordinaires en opposition complète avec les lois naturelles. Tel était Cagliostro, par exemple, pour citer un cas historique, un magicien examiné par le Saint-Office de Rome, dont le procès rapporte des faits qui n’ont aucun rapport avec les actes accomplis par les possédées de Loudun ou autres exorcisées également bien connues.

Comment se fait-il que, chez les possédés ordinaires, le démon semble les posséder entièrement, être leur maitre, qu’ils soient en quelque sorte sa proie, son sujet à persécution, toujours et constamment jusqu’à délivrance, que le malin, en un mot, les fasse souffrir ou les laisse tranquilles, à sa volonté, sans que le possédé puisse de son autorité provoquer ses accès ou les ralentir ou les arrêter ? Et comment se fait-il que d’autres possédés ne soient nullement tourmentés, et paraissent même (ce n’est qu’une apparence) être les maitres du démon qui est en eux, et soient, non pas possédés à l’état parent, mais seulement à l’état latent ? — C’est là la question difficile à trancher, sur laquelle j’ai peut-être une opinion personnelle, mais que je ne saurais exposer dans une publication populaire comme celle-ci, parce qu’elle n’a pas encore subi le contrôle et la discussion des théologiens. Tout au plus dirai-je que, a priori, il se pourrait que les fils ou filles de possédés latents ou grands possédés, — ainsi il me semble comprendre le cas de Philéas Walder qui se mit en état de pénétration dans les circonstances à la suite desquelles naquit Sophia, — il se pourrait que ces êtres de naissance due à l’on ne sait quelle mystérieuse coopération diabolique, enfants de diable, si je puis m’exprimer ainsi, tinssent de leur origine ou de leur haute imprégnation originelle la propriété d’être d’une nature quasi-mixte, démoniaque par essence, et que, dès lors, diables incarnés, selon le terme souvent usité dans un autre sens, diables humains, mâles ou femelles, ils soient au diable d’enfer ce que le lard est au cochon, — on me pardonnera cette comparaison vulgaire, mais bien nette, — partie intégrante d’un tout, et