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des Reducci, ou survivants des batailles patriotiques (lisez : garibaldiennes) ; ce sont les groupes irrédentistes, qui, prétextant que l’unité italienne n’est pas encore complète, réclament des provinces à la France, à l’Autriche, à la Suisse.

Et l’on ne saurait trop faire remarquer ces contradictions flagrantes, qui éclatent suivant les circonstances de temps et de lieux. Comme principe général, les ultra-révolutionnaires proclament l’abolition de la patrie ; c’est un des articles essentiels de leur programme, à quelque nation qu’ils appartiennent. Pourquoi alors l’irrédentisme, qui est au fond du cœur de tout anarchiste italien ? pourquoi Bakounine lui-même était-il panslaviste ? Cela paraît incompréhensible, cela déroute l’observateur non initié. Pour comprendre, il faut savoir et ne pas perdre de vue que tous ces articles principaux des programmes révolutionnaires et toutes les revendications soi-disant nationales ou internationales ne sont que des moyens accessoires pour les sectes et que le réel et unique article du programme de la Révolution, sans distinction de partis ou d’écoles, est : « Guerre à Dieu et à son Église ! »

Partout, en 1879, l’agitation sociale s’organise, prenant tel ou tel drapeau, selon les circonstances. En Italie, les funérailles du général Avezzano à Rome donnent lieu à des manifestations irrédentistes. En Irlande, le fenian Michel Davitt fonde la ligue agraire et prêche l’insurrection ; et là, comme ailleurs, il s’agit si peu de patriotisme, au fond, que les catholiques clairvoyants ne se laissent pas tromper, et l’archevêque de Dublin, dans une magnifique lettre pastorale, désapprouve énergiquement cette suspecte agitation.

En Russie, les crimes isolés contre les fonctionnaires supérieurs se multiplient ; le journal nihiliste Terre et Liberté excite au meurtre. Deux attentats contre le tsar : le 14 avril, à Saint-Pétersbourg, où Solowief tire cinq coups de revolver sans l’atteindre (pendu le 10 juin) ; et le 1er décembre, sur le chemin de fer de Moscou, où une mine devait éclater au passage du train impérial (affaire Hartmann).

Et que l’on ne vienne pas dire que tout cela ne se tient pas ; je vais en donner bientôt la preuve.

À la suite de l’attentat de Solowief, la police russe procède à des perquisitions chez les révolutionnaires militants ; or, qu’est-ce qu’elle trouve dans un faubourg de Kieff, au quartier de Podol, habité par les marchands ? Elle trouve plusieurs caisses contenant des bombes Orsini, du modèle de celles employées dans un si grand nombre d’attentats historiques, qui furent ordonnés dans la période de 1850 à 1870 par le fameux comité de haute-maçonnerie interuationale dont le président était Mazzini. Oui, ce sont les mêmes bombes maçonniques que la police russe trouve en 1879