Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 2.djvu/25

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

officier ; en octobre, l’ouvrier anarchiste Passanante tente d’assassiner le roi à Naples, en pleine rue ; son couteau atteint légèrement Humbert Ier et un peu plus gravement le président du conseil des ministres, Cairoli ; en novembre, à Florence, des bombes explosibles sont lancées au milieu du cortège royal et blessent plusieurs personnes.

La même année, en Suisse, paraît l’Avant-Garde, le premier journal anarchiste dirigé par Kropotkine. À Fribourg, congrès anarchiste, où il est donné lecture d’un mémoire envoyé par Élisée Reclus, qui propose de nommer une commission chargée de rédiger un manifeste répondant à ces trois questions : « Pourquoi sommes-nous : 1° révolutionnaires, 2° anarchistes, 3° collectivistes ? » Et Élisée Reclus répond d’avance en déclarant : « Nous sommes révolutionnaires, parce que jamais un progrès ne s’est accompli par simple évolution pacifique ; il s’est toujours fait par une révolution soudaine : nous sommes anarchistes, parce que nous ne voulons personne pour maître et que nous ne voulons être les maitres de personne ; mais nous sommes aussi politiques internationaux, car nous comprenons que la vie est impossible sans groupement social. » Le congrès adopte la proposition Reclus et se prononce : « quant aux principes, pour l’appropriation collective de la richesse sociale, et pour l’abolition de l’État sous toutes ses formes, y compris la prétendue agence centrale des services publics ; quant aux moyens, pour la propagande théorique, menée de front avec l’action insurrectionnelle et révolutionnaire. » Le congrès déclare, en outre, que « le vote ne saurait être considéré comme un principe de droit capable de réaliser la soi-disant souveraineté du peuple ; come instrument, son emploi est toujours dangereux. » En novembre, le gouvernement fédéral prononce la suppression de l’Avant-Garde et la saisie de ses presses, ce journal prêchant ouvertement l’assassinat politique.

Dès 1879, l’Avant-Garde est remplacé par le Révolté. À un congrès révolutionnaire tenu à la Chaux-de-Fonds (Suisse), Kropotkine prêche la propagande par le fait. À Marseille, autre congrès socialiste, organisé par des ouvriers révolutionnaires ; on y vote l’expropriation, sans indemnité, de tous les possédants, au profit de la collectivité des prolétaires. En Espagne, le roi Alphonse XII et la reine Marie-Christine d’Autriche, mariés depuis un mois à peine, sont tous deux l’objet d’un attentat à Madrid, dans la rue, en plein jour, par un ouvrier anarchiste, Francesco Otero Gonzalès, qui ne les atteint pas (30 décembre). En Italie, les pires révolutionnaires commencent à s’organiser sérieusement, en cette même année ; mais, plus prudents qu’ailleurs, ou, si l’on préfère, plus habiles, grâce à l’influence chez eux plus directement exercée par les chefs de la maçonnerie, ils mettent leur organisation sous le couvert du patriotisme. Ce sont les sociétés