Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 2.djvu/242

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en signalant le rôle de telles diablesses ; les catholiques étant avertis, on pourra, je pense, arrêter plus facilement le mal dès le début, puisque maintenant la source sera facile à deviner.

Au point de vue de l’avantage direct, on ne voit guère quel parti la haute-maçonnerie peut tirer de l’institution des Serpents Roses : porter le trouble dans tel ou tel couvent, ce n’est point là ce qui peut assurer la prédominance de la secte. Aussi, convient-il d’envisager les choses autrement. À mon avis, en manœuvrant sur ce terrain, le Palladisme s’exerce, essaie une tactique. Les lucifériens du Souverain Directoire Exécutif veulent-ils préparer, par les Serpents Roses, la corruption de quelque ordre religieux, qui deviendrait, au sein du catholicisme, le réceptacle caché des infamies sataniques ? C’est possible. N’oublions pas les leçons de l’histoire. Les Templiers formaient un ordre religieux et militaire qui fut longtemps irréprochable sous tous les rapports ; le Gnosticisme d’Orient réussit à s’y insinuer, et cette chevalerie chrétienne devint une société secrète de diabolisants, tout en sauvegardant les apparences, tout en continuant à faire croire aux hautes vertus des membres de l’ordre. À l’heure qu’il est, un renouvellement de cette abomination se prépare peut-être ; par les Serpents Roses, on tâte le terrain. Vienne un Urbain Grandier pour empoisonner non plus un couvent, mais toute une congrégation, et voilà les religieuses-magiciennes, parmi lesquelles serait choisie, au moment propice, la mère de l’Ante-Christ. Après les faux chevaliers chrétiens, après les faux moines, les fausses religieuses, les Épouses des Cantiques. Voilà ce qui est à redouter.

Et qu’on ne vienne pas me dire que je suis pessimiste ; on ne saurait trop se défier des embûches du diable : le malin a plus d’un tour dans son sac.

Les chefs de la Ré-Théurgie Optimate ne reculent devant rien, imaginent et mettent à exécution les entreprises les plus invraisemblables. Leur malice, il y a peu d’années, les avait poussés à fonder une loge palladiste de petites filles dans un pensionnat dirigé par des religieuses. Ces malheureuses enfants, sous l’inspiration de parents criminels, se concertaient pour voler les hosties consacrées et éprouvaient une joie infernale à les enterrer, faisant dévorer les Saintes Espèces par des vers, par des fourmis. Ces horreurs furent découvertes. Les fillettes, coupables de tels forfaits, n’agissaient pas par inconscience. L’évêque du diocèse, informé, procéda discrètement à une enquête et eut bientôt la certitude que ces crimes contre la divine Eucharistie se perpétraient et s’accomplissaient à l’instigation de quelques parents des jeunes filles, tous francs-maçons, membres d’un triangle du chef-lieu.

N’est-ce point là le dernier mot des pratiques d’exécration du culte luciférien organisé ?