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Ces femmes vivent donc ensemble, comme les odalisques d’un sérail, sous la direction de trois Custodiaires résidents (grand-chaplains) ; Pike leur donne le nom de Sacerdos Custos. Les vraies Godlike-Enchantress sont celles de la seconde classe, les Cypriennes ; les Minervales servent de domestiques à celles-ci, remplissent toutes les fonctions infimes, font la cuisine, le blanchissage du linge, veillent en un mot à tous les soins de ce grand ménage en commun. Les Castodiaires sont, en quelque sorte, comme les aumôniers du couvent ; il n’y a qu’eux qui sortent de l’immeuble. L’un d’entre eux est l’économe de la communauté ; un autre est chef spécial du service effectué par les Minervales ; le troisième est le supérieur de la maison. Ainsi que dans les harems, il y a quelques serviteurs, eunuques ; ce sont des palladistes de caste inférieure, gens incapables de gagner leur vie dans la société profane, et qui se résignent à ce bas emploi, avec la dégradation qu’il comporte, pour avoir l’existence assurée sans grande besogne à faire. Ces serviteurs eunuques vont aux provisions, sous la conduite du Custodiaire économe.

Les Minervales couchent ensemble, pêle-mêle, dans un vaste dortoir. Les Cypriennes, au contraire, ont chacune leur cellule. Dans la journée, les Cypriennes se réunissent dans une grande salle commune, appelée le Nuptorium, au centre de laquelle est une énorme statue du Baphomet. Là, elles chantent des hymnes et des cantiques au Dieu-Bon et aux esprits du feu ; elles obtiennent, parait-il, de fréquentes manifestations diaboliques. Elles jouent avec des serpents apprivoisés, nonchalamment couchées sur de moelleux sofas. Sous aucun prétexte, les Minervales (innuptæ cantatrices) ne peuvent pénétrer dans le Nuptorium.

Ce nom de la grande salle commune des Cypriennes, qui veut dire « chambre nuptiale », vient de ce que les Godlike-Enchantress de la deuxième classe sont, en cet endroit même, et non dans leurs cellules, épousées par les « daimons » qui leur apparaissent. Un pastos est au pied du Baphomet, et l’esprit du feu qui daigne se montrer aux vestales lucifériennes désigne la Cyprienne préférée. Il se passe alors des scènes d’orgie infernale qui ne sauraient être décrites.

Ce serait une erreur de croire que tout ceci n’est qu’une fantasmagorie, et que les couvents de Godlike-Enchantress sont des harems secrets à l’usage des palladistes, se faisant passer pour « daimons » aux yeux des recluses. Il n’y a aucune supercherie en ces retraites mystérieuses, et, du reste, les palladistes n’ont nullement besoin de cela ; les réunions ordinaires des triangles et même des simples loges d’adoption leur offrent assez de victimes. Les abominations du Nuptorium sont bien le fait de vrais diables ; jamais un enfant n’est né dans une communauté de Godlike-Enchantress ; aussi, les Cypriennes sont considérées comme demeurant vierges. Leur situation est fort enviée parmi les Maîtresses Templières des triangles asia-