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Quant à leurs livres saints, les palladistes n’en manquent pas. Le livre par excellence, le livre divin, la Bible luciférienne, c’est le Livre Apadno, qui, assure-t-on à Charleston, n’a pas été écrit par une main humaine ; l’écriture passe pour être celle de Lucifer en personne. Vient ensuite le Livre des Révélations, dont l’écrivain inspiré est Albert Pike, manuscrit coté et paraphé à chaque page par une signature de diable. Ces deux livres sacrés ne sont pas et ne doivent pas être imprimés ; mais le Souverain Directoire Exécutif et chaque Grand Directoire Central en ont une copie complète, sur laquelle il est permis aux Mages Élus et aux Maîtresses Templières Souveraines de relever des extraits en vue des interprétations à donner en conférences triangulaires. Albert Pike a laissé aussi le Verbe Suprême, ouvrage essentiellement palladique, objet de vénération, et la Vraie Lumière, recueil d’épîtres et d’instructions, dont plusieurs sont applicables à la direction du Rite Écossais. Ces deux ouvrages, ainsi que la Conduite secrète du Palladisme, ne sont imprimés qu’à 77 exemplaires, répartis entre les 77 Lotus de chef-lieu des provinces triangulaires ; ils sont rédigés en trois langues, latin, anglais et français, les trois versions réunies dans chaque exemplaire. Un opuscule sacro-saint, de quelques feuillets seulement, c’est le Rituel de Mage Élu ; on l’attribue à Baal-Zeboub : il n’est pas imprimé, et il n’en existe que 33 copies authentiques délivrées par Charleston aux Mères Loges du Lotus.

Il est impossible de parler du culte luciférien des triangles sans mentionner, pour finir, les Godlike-Enchantress et les Serpents Roses.

J’ai déjà dit quelques mots des premières, dans la Revue Mensuelle (no 4), en réponse à un correspondant, évidemment palladiste, qui, dans une lettre agrémentée de quelques injures, — et non signée, bien entendu, — m’écrivait :


« Miss Diana a vos sympathies, on voit bien pourquoi : c’est uniquement parce qu’elle a le plus contribué à créer le schisme dans la haute maçonnerie ; orgueilleuse et indisciplinée, elle est un ferment de discorde. Vous en faites la huitième merveille : dans les pages que vous lui avez consacrées, vous vous êtes attaché à faire ressortir qu’elle est vierge, sachant que ceci la recommanderait particulièrement à l’admiration de vos lecteurs catholiques. Il n’y a pas de quoi, pourtant !… Pourquoi alors n’avez-vous pas parlé des Godlike-Enchantress ? Comment ! vous ne rougissez pas de violer votre serment de discrétion, et, pour rendre plus sympathique celle dont la révolte vous est si précieuse, vous gardez le silence sur les divines cantatrices ? Elles sont, cependant, bien vierges, elles aussi. Mais elles vous gênent dans votre argumentation, et vous tenez à ce qu’elles n’existent pas. Voilà votre bonne foi ! »


Après avoir cité ce fragment de l’épitre, je faisais remarquer, d’abord, à mon correspondant anonyme que, par sa lettre seule, il violait lui-même le fameux serment de discrétion. Mais j’avais soin de déclarer ensuite que je