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Une étrange oraison, c’est la « Prière pour la recommandation d’une âme d’adonaïte en vue de sa conversion ». Il s’agit, là, d’une prière particulière. On ne la dit pas dans les ateliers triangulaires ; elle est simplement à l’usage des fervents du Palladisme ; car la religion luciférienne a ses dévots, croyant en toute sincérité que nous, catholiques, sommes dans l’erreur et qui font des vœux pour que nous en sortions. C’est cette prière-là que miss Vaughan dit de tout cœur, chaque soir, à l’intention de ses amis profanes qu’elle voudrait voir « s’arracher aux abîmes ténébreux de l’adonaïsme » ; elle les recommande pieusement à Lucifer, afin qu’il les « comble de sa grâce ».

La dévotion palladique comporte encore des Actes de Foi, d’Espérance et d’Amour envers le Dieu-Bon. Bref, comme on le voit, le culte est complet.

Quant aux sacrements lucifériens, ils sont au nombre de sept ; mais le premier ne se donne pas dans l’atelier triangulaire, même au premier degré. Quand de la maçonnerie ordinaire on passe au Palladisme, on a déjà reçu le premier sacrement de Satan depuis longtemps, mais sans le savoir.

Voici les noms de ces sacrements, dans leur ordre :

1. La Purification. — 2. L’Armement. — 3. L’Heptagathon. — 4. Le Saint-Sacrifice. — 5. Le Baiser du Mage. — 6. L’Éternel Pacte. — 7. La Préservation.

La Purification, ou baptême du feu, n’est autre que la cérémonie qui a lieu en loge de la maçonnerie ordinaire, lors de la première initiation. Tout le monde sait que le profane qui, après certaines épreuves, vient d’être, sur le consentement de la loge, admis à prêter son serment, est, à la suite de cette formalité, délivré brusquement, d’un seul coup, du bandeau dont ses yeux étaient couverts, en même temps qu’il est environné de flammes (au moyen d’une lampe à lycopode) et qu’il voit autour de lui des frères appuyant leurs épées sur son sein ; alors, une fois passé par les flammes, le néophyte est reçu définitivement, est consacré Maçon et proclamé au grade d’Apprenti. C’est ce « passage par les flammes » qui constitue le baptême luciférien ; l’adepte est ainsi purifié de la souillure du baptême adonaïte par l’eau. Tout maçon est donc, en principe, voué à connaître le dernier secret, c’est-à-dire à savoir qui est le Grand Architecte et à l’adorer. Mais, jusqu’à ce qu’il soit choisi par les parfaits initiés, il ignore la portée de la cérémonie qu’il a subie à son début dans la vie maçonnique. « De même, le nouveau-né catholique, écrit Albert Pike dans la Conduite secrète du Palladisme, a reçu inconsciemment le baptême de l’eau, qui l’a fait enfant d’Adonai, et il demeurera ainsi enfant d’Adonaï, sans le savoir, jusqu’à l’âge dit de raison, jusqu’à ce que l’évêque le confirme dans sa religion. »

Pour la maçonnerie, où la vraie lumière n’est enfin donnée que dans les triangles, l’âge de raison n’est donc pas atteint, tant que la sélection secrète