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Ce luciférianisme, inepte autant que sacrilège, confond vraiment l’imagination.

Un « kabbaliste » de l’Étoile loue tout cela dans ces termes :

« Ma bien-aimée sœur, la baronne de Vay-de-Vaga, est un médium dont toutes les révélations qu’elle obtient des Esprits portent le cachet divin, sont une véritable initiation aux secrets de Dieu. »

Je dois, en passant, mentionner Mme  Lucie Grange, la pythonisse d’Auteuil, très en faveur auprès des cerveaux troublés de l’aristocratie parisienne. Cette personne, dont le daimon familier est Hermès, ne veut, à aucun prix, être considérée comme sataniste ; elle est, tout au contraire, pour « le Dieu inconnu qui est un fleuve de lumière ».

Mme  Lucie Grange est la veuve d’un franc-maçon qui a joué un rôle assez actif dans l’armée de la Commune. Ancien vénérable, athée avant son mariage, le F∴ Adolphe Grange fut converti par sa femme au spiritisme, et s’efforça dès lors d’établir une entente entre la Maçonnerie et le Spiritisme.

Mme  Lucie Grange, qui a déclaré la guerre à la Magie noire, est dédaignée et vilipendée par l’Initiation, mais est au mieux avec le groupe de l’Étoile, qui reçoit ses communications et insère ses visions. Elle se donne une mission surnaturelle, qu’elle a reçue… de l’archange saint Michel !

L’archange lui apparut en 1883, environné d’une multitude d’esprits représentant tous les pays du monde ; un immense étendard bleu céleste le dominait tenu par un esprit allégorique : la Lumière. Elle fonda alors une revue portant ce titre : La Lumière, destinée à prêcher le Nouveau Spiritualisme, ou la doctrine du Pur Amour, « révélation nouvelle qui doit nous unifier dans un immense amour sans préjugés et dans une majestueuse vérité sans voiles. » Le symbole choisi par Mme  Lucie Grange est : un cœur embrasé, divinisé dans le triangle. Elle attend et prophétise le nouveau Messie : « Les Israélites, dit-elle, qui attendent encore leur Messie, vont le recevoir en grande pompe au sanctuaire du temple colossal universel ».

Elle a fondé une association spirite sous le nom de : Communion universelle des âmes dans l’Amour divin.

Mme Lucie Grange est très chatouilleuse à l’endroit de la propriété des révélations spirituelles qui lui viennent de l’autre monde. C’est ainsi qu’en 1891 elle a fort malmené la duchesse de Pomar, qui avait eu l’audace de s’approprier des inspirations qu’elle lui avait communiquées, la traitant de plagiaire et l’accusant de « détournement de documents inspirés ». L’abbé Roca se trouvait impliqué dans l’accusation, pour avoir osé attribuer à la duchesse les révélations de Mme  Lucie Grange.

M. Jules Bois, qui l’a visitée dans son sanctuaire d’Auteuil, raconte ainsi son entrevue :