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Les générations, régénérées à la lumière de l’ésotérisme pomarien, devront encore professer : la génération éternelle des cycles et des mondes, la nature androgyne de la divinité, les émanations par couples d’éons mâles et femelles (nous voilà dans le gnosticisme !), enfin l’absorption finale de tout dans la substance du premier principe.

En somme, la duchesse de Pomar est une personnalité à part dans le monde de l’occultisme, bien que chez elle tous les diabolisants des divers groupes avoués se donnent rendez-vous ; et si ses théories sont le plus souvent confuses, ce qui est clair, par contre, c’est que le démon est maître en son salon. Là, en petit comité, les apparitions sont fréquentes. Un diable, empruntant la forme de Marie Stuart, s’est même constitué son génie familier, son conseil et protecteur. Elle l’évoque, et il vient à son appel. Il lui parle à haute voix, s’il demeure invisible ; mais il se montre aussi, et les hôtes de la maison l’ont vu.

« — Travaillez dans votre joli boudoir, lui dit un jour ce démon ; travaillez là, et vivez de la vie divine. »

Elle lui donne des rendez-vous à minuit. La duchesse a raconté tout au long une de ces entrevues, sous le titre : Une visite nocturne à Holyrood.

Il me faut aussi signaler la baronne Adelma de Vay-de-Vaga, une jeune femme de vingt-six ans, hongroise, de Styric, autre vocate procédante du grand monde. On lui doit la fondation de la Société spirite de Buda-Pest.

L’Étoile est pleine de ses révélations. Il faut dire, à la décharge de l’Étoile, que la baronne paie les frais d’impression. Elle y raconte, avec les plus minutieux détails, les découvertes faites dans ses voyages aériens où les esprits la transportent dans les sphères célestes. S’il faut en croire ces récits extraordinaires, plus rien ne nous est inconnu de ce qui se passe dans Vénus ou dans la Lune. Ainsi, par exemple, nous apprenons que les habitants de la planète Vénus professent la religion déiste et n’ont d’autres moyens de locomotion que des ballons très bien organisés, des bateaux aériens ; qu’il n’y a dans Vénus ni monarchie, ni aristocratie, etc.

Les révélations doctrinales sont à la hauteur des révélations astronomiques. La baronne appelle « esprits élémentaires » certains des démons avec lesquels elle est en communication. Ces esprits sont projetés du soleil par Lucifer ; chaque rayon de l’astre central de notre système planétaire en contient des myriades. C’est ainsi que le Dieu-Soleil pénètre en nous, nous illumine et nous tient sous sa sublime domination. Un corps charnel va naître ; aussitôt Lucifer en prend possession par ses esprits élémentaires, dont sept s’incarnent dans le nouveau-né ; ce qui fait, dit la baronne, que l’homme n’est plus un binaire, ni un ternaire, mais un hepténaire.

Le démon, en se jouant ainsi de cette malheureuse baronne Adelma de Vay, lui fait proclamer des extravagances où la folie se mêle au dogma-