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DIXIÈME PARTIE


LES LUCIFÉRIENS DISSIDENTS




CHAPITRE XXXVIII

Les diabolisants du grand monde


En dehors des personnages que j’ai classés comme goètes dans la précédente partie, et avant d’arriver aux théurges, aux vrais théurges modernes, tels que les a définis le docte Albert Pike, il faut nous arrêter un moment à une catégorie de diabolisants ; qui ne sont pas mages noirs et qui néanmoins, ne sauraient être confondus avec les palladistes.

Ils ne sont pas tout à fait lucifériens, selon la doctrine des triangles ; le Palladium Réformé Nouveau ne les compte pas, au surplus, au nombre de ses adeptes. Et cependant ils sont plutôt lucifériens que satanistes.

Ce sont, en général, des gens du grand monde, qui ont rompu depuis longtemps avec les banalités du spiritisme vulgaire, et qui, peu à peu sans le savoir, sans y prendre garde, sont devenus de vrais vocates procédants. Soit qu’il ne leur plaise pas de s’enrégimenter dans la secte maçonnique, soit que les recruteurs des loges ne se soient jamais adressés à eux, toujours est-il qu’ils ne sont pas francs-maçons. Ah ! s’ils appartenaient à la confrérie trois-points, ils seraient bien vite distingués dans les chapitres et les aréopages par les inspecteurs secrets du Palladium et leur affiliation au rite charlestonien des Ré-Théurgistes Optimales serait prompte ; car leur erreur diffère bien peu de l’idée luciférienne selon Pike.

Parmi ces lucifériens hors cadre, on peut, sans craindre de commettre une erreur, noter M. le duc de Camposelice, occultiste amateur, qui dépense des sommes folles à son culte passionné pour Lucifer.

C’est ainsi que, le 7 mai 1853, il avait loué la grande salle du Trocadéro pour lui et ses amis. Là, à portes soigneusement closes, il fit représenter un oratorio diabolique, de sa composition quant au libretto ; la musique était de Peter Benoît. L’orchestre, avec double chœur, ne comptait pas moins de 500 exécutants. Le baryton Blauwœrt tenait le rôle principal : Lucifer, dont l’oratorio portait hardiment le titre. M. de Camposelice avait, en outre, engagé le ténor Vergnet, de l’Opéra, Mme Montalba, soprano, de l’Opéra,