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Congrès de 1889 a porté ses fruits, et que depuis cette époque une large recrudescence de satanisme s’est manifestée, dans la double ligue du spiritisme et de l’occultisme, par toutes les voies préconisées par le Comité de propagande, fidèle à son mandat diabolique.

Un seul point gêne et embarrasse cette propagande : la persévérance invincible du catholicisme, tant de fois tué en paroles par ses ennemis, et qui pourtant ne meurt pas, appuyé qu’il est sur cette parole infaillible : « Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon église, et les portes de l’enfer ne prévaudront pas contre elle. »

Les propagandistes de l’enfer comprennent eux mêmes leur faiblesse et leur impuissance devant l’obstacle divin où viennent se briser leurs efforts sacrilèges. L’un d’eux, un rédacteur de la Revue Spirite, écrivait dernièrement, en demandant la dénonciation du Concordat :

« L’obstacle renversé, alors le but même que se propose le Spiritisme pourra être entrepris efficacement. Jusque-là, tous ses travaux, toutes ses luttes ne sauraient être que des travaux préparatoires et des luttes circonscrites. » .


Enfin, il est des circonstances où la rage infernale des goètes éclate presque publiquement, et l’on en a des manifestations par ces vols d’hosties consacrées dont la fréquence épouvante la foi catholique ; à quel groupe attribuer telle ou telle de ces soustractions audacieuses autant que sacrilèges ? on ne saurait préciser. D’autres fois, les goètes vont jusqu’à pratiquer quelqu’un de leurs « gestes » rituels coram populo, et l’ignorance de la presse prend pour une excentricité ce qui est vraiment et réellement une abomination.

Ainsi, je me souviens avoir lu, dans les journaux boulevardiers, il y a trois ou quatre ans, un récit de manifestation péladanesque, dont on se contenta de sourire.

Le sûr Peladan et un certain nombre de ses amis avaient demandé, je ne me rappelle plus sous quel prétexte, la célébration d’une messe à Notre-Dame de Paris. Pendant toute la première partie du saint-office, ils se tinrent tranquilles ; comme de vrais fidèles, ils avaient l’air recueilli. Mais, au moment de l’élévation, au lieu de s’agenouiller sur les dalles de la basilique, ils restèrent debout, et chacun, tirant de dessous son habit un petit poignard, le brandit dans la direction de l’autel, tandis que le prêtre élevait vers le ciel le pain eucharistique. Le suisse s’empressa de mettre ordre à cette manifestation incompréhensible ; puis, ces messieurs qui avaient repris leur première attitude de calme, furent réprimandés, à la sacristie, à la fin de la messe. On leur demanda ce que signifiait ce geste, qu’on prenait pour une folie. Ils répondirent qu’étant excellents catholiques, c’était leur manière de