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Présidents d’honneur : Charles Fauvety, duchesse de Pomar, Marcus de Vèze, Eugène Nus.

Président effectif : Jules Lermina.


Accepter un tel homme pour président, c’était de la part du Congrès témoigner hautement qu’il était prêt à faire litière de tous les principes, je ne dirai pas religieux, mais simplement philosophiques et sociaux. Jules Lermina, est en effet, l’un des ouvriers les plus actifs de la presse matérialiste et athée. Et il était si notoirement connu comme tel, que son élection à la présidence du Congrès souleva au sein même des adeptes de l’occultisme les plus vives récriminations. Le New Spiritualistiche Blaetter, de Berlin, et l’Op de grenzen vantwec werelden (sur les frontières des deux mondes), de La Haye, protestèrent, par l’organe de Mme Van Colcar, la directrice de ce dernier journal, contre la nomination d’un athée matérialiste, comme président d’un Congrès s’intitulant avant tout spiritualiste[1].

Comme s’il eût voulu donner raison à cette légitime protestation, aussitôt après le Congrès, M. Lermina publiait sur la science occulte un ouvrage[2] où, se défendant d’être devenu spiritualiste, il écrivait en propres termes : « La vérité, c’est qu’il n’y a que du matérialisme, en ce sens que les avenirs, — si tant est qu’ils existent, — ne représentent qu’une dilution, qu’une sublimation de la matière, douée en d’autres états de propriétés qui n’existent pas sous les formes que nous connaissons. » Et il disait vrai, le spiritisme, comme nous l’avons vu, n’étant en effet qu’une forme spécieuse du matérialisme.

Bien qu’il essayât, comme président du Congrès, de mettre une sourdine à l’expression de ses véritables sentiments, le bout de l’oreille satanique perce malgré lui jusque dans son discours d’ouverture. Il y caractérise ainsi le Congrès : « la levée en masse des chercheurs de vérité contre l’obscurantisme, qui se réclame, pour arrêter l’essor de l’esprit humain, de l’intolérance persécutrice et irraisonnée des Académies et des Églises. » En d’autres termes : la levée en masse des sectateurs d’une science occulte repoussée par les savants et maudite par l’Église. Si l’on pouvait douter que par cet obscurantisme, contre lequel se fait cette levée en masse de l’armée de Satan, le président du Congrès vise autre chose que le catholicisme, toute incertitude tomberait devant cet autre passage du même livre :

  1. Lermina lui-même se crut obligé de répondre à ces protestations indignées : il le fit à la deuxième séance publique, en étalant ses titres de libre-penseur, impartial et de bonne foi, uniquement dévoué à la recherche désintéressée de la vérité, « par la voie de l’occultisme oriental et du Kabbalisme hébraïque. »
  2. Magie pratique : Révélation des mystères de la vie et de la mort. 1890.