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ignorants et les fanatiques prendront pour des êtres vivants ces coques défuntes, ces drèches, ces vains fantômes, et subiront leurs obsessions. »


Malgré toutes les excommunications et les interdits, l’apostat Roca, l’ermite du château de Pollestres, comme il aimait à s’appeler, n’en persistait pas moins à vouloir s’intituler prêtre catholique :


« On m’a chassé de l’autel, dit-il, on m’a dépouillé de mes insignes, de mon camail, de mon étole, voire même de ma soutane. Et qu’importe ? Est-ce que le Christ ne fut pas chassé de la Synagogue et cloué sur une croix par les pontifes d’un autre sacerdoce, et pour des raisons pareilles ? C’est trop d’honneur qu’on me fait en m’assimilant à lui… »


Espérant qu’il réussirait ainsi à tromper toujours des âmes candides et à les entraîner sous sa direction, l’apostat ne cessa, jusqu’à sa mort, de se proclamer irréprochable et d’une orthodoxie parfaite sur tous les dogmes du catholicisme sans exception ; quand il parlait de la sorte, il sous-entendait que c’était l’Église actuelle qui avait perdu le vrai sens de ses dogmes.

Voici une de ces tentatives dans ce sens ; elle est des plus audacieuses. Le 12 juin 1890, l’Étoile publia une lettre de lui, « lettre ouverte à son curé », où se lisent les lignes suivantes :


« À ma mort, vous aurez, mon cher ami, à prendre une détermination dont vous comprendrez toute la gravité, quand je vous aurai dit que j’entends mourir en chrétien fidèle, non seulement comme membre du corps social vivant du Christ-Esprit, ou, ce qui revient au même, de son Église une, sainte, catholique et apostolique, mais encore comme prêtre, c’est-à-dire comme ministre ou serviteur dévoué de ce même corps, de cette même Église.

« En conséquence, je sollicite humblement de mon curé, au moins pour l’heure de ma mort, l’administration des derniers sacrements et, pour après ma mort, les honneurs de la sépulture ecclésiastique.

« Si ces grands bienfaits me sont refusés, j’ai la douleur de vous informer que des mesures sont prises pour que ce refus soit porté à la connaissance de tout le monde, par la publication qui en sera faite d’abord, sur ma tombe, à l’heure même de mon enterrement, et ensuite dans les revues et dans les journaux où j’écris, et qui tous se feront un devoir d’insérer en même temps ma profession de foi catholique et le texte de la présente lettre. »


Ce malheureux a eu une terrible fin ; et je me demande comment elle n’a pas mieux donné à réfléchir aux complices de ce mauvais prêtre diabolisant.

L’apostat Roca, frappé par la main de Dieu, est mort subitement l’année dernière (1893), à Néfiach, d’une attaque d’apoplexie, à l’âge de soixante-trois ans. Naturellement, l’Église lui refusa la sépulture ecclésiastique ; ses amis, les gnostiques valentiniens et les gnostiques messianistes, le firent enterrer civilement. Nous avons vu plus haut le F∴ Doinel présider une cérémonie en son honneur « pour la délivrance de son enveloppe astrale ».