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On pense que, se trouvant en présence d’un homme qui émettait de pareilles idées, l’Église lui retira promptement le ministère des âmes ; la complicité de l’abbé Roca avec la secte infernale était par trop évidente.

Comme tous les hérésiarques les plus pervers, il déclarait que l’Église avait manqué à sa mission et qu’il fallait la régénérer. « J’ai déjà mis devant le Pape notre situation religieuse, qui est déplorable », écrivait-il dans le Christ, le Pape et la Démocratie. « Le Vatican est un ver rongeur, et il a si bien rongé l’Église catholique, qu’il l’a réduite à l’état lamentable que tout le monde sait… Le romanisme enveloppe le catholicisme ; il le ronge et l’épuise. Mais un nouveau temple se dresse sur les ruines de l’ancien ; le Christ renaît transfiguré. » Nous savons ce que cela veut dire, nous savons quel est le Christos des occultistes.

Dans l’Étoile, revue occultiste à laquelle il collaborait, il a publié, sous la forme d’un roman intitulé L’abbé Gabriel et sa fiancée Henriette, une longue et indigeste diatribe contre le célibat ecclésiastique, qu’il appelle une « plantation inhumaine et diabolique ».

Il prêchait, en toute occasion, et notamment sous prétexte de socialisme néo-chrétien, la haine de la Papauté. L’existence du Saint-Siège le mettait hors de lui, et, quand il voulait parler du Vatican, il oubliait ses manières doucereuses habituelles et devenait violent jusqu’à la rage. Rome avait dédaigné ses avertissements, elle était condamnée à périr.


« Le jugement dernier, écrivait-il dans l’Étoile, prédit au monde par le Messie, va se faire sur Rome, à la barre des peuples indignés. Incipiet judicium a domo Dei ! car c’est de là qu’est venue la corruption, à partir du jour où l’abomination de la désolation, prévue par le Messie, s’est assise dans le Temple romain, où l’ont introduite les politiciens du sanctuaire. Cette souillon (sic) n’est pas autre chose, au dire des prophètes, que l’exécrable politique des Césars. De nos jours, celle-ci règne en maîtresse dans le lieu saint. Oh ! l’infâme prostituée de toutes les Babylones !… C’est connu, c’est patent, c’est scandaleux ! Sortie de là, après avoir perverti toutes les cléricatures, cette dévergondée a corrompu tous les pouvoirs civils… Voilà ce que Rome a fait du monde officiel ! »


Ne croirait-on pas entendre un possédé, grinçant des dents et écumant de fureur sous l’aspersion de l’exorciste ?

En avril 1890, l’abbé Roca adressait un appel à ses frères du sacerdoce catholique, où il exposait les principaux points suivants :


1° Accord entre l’idéalité messianique des âges primitifs et l’intellectualité des temps modernes ;

2° Rapports existant entre les « conceptions saintes des kabbalistes chrétiens », et les aspirations égalitaires des nouvelles couches sociales et des grandes masses prolétaires ;

3° Rapports entre le Socialisme évangélique et apostolique, et le Socialisme des Karl Marx et des Bebel, « dont les idées révolutionnaires et les principes