Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 2.djvu/158

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

âme animale du système de Valentin n’est autre, on le voit, que le périsprit des spirites ; enfin, le corps (hylé), qui est formé de la substance matérielle. Et la rédemption, qui est l’œuvre de l’éon Jésus-Soter, consiste à séparer ces trois éléments. En effet, dans ce système, il y a un diable le Cosmocrator, à qui est soumis le corps matériel et qui est ainsi le persécuteur de l’humanité, l’auteur des maladies et des fléaux ; mais il est facile de comprendre qui est le diable, aux yeux des gnostiques valentiniens. Tout en décomposant en éons la divinité, cette secte ne se rallie pas au système des deux principes égaux en puissance et se combattant de toute éternité. Elle base sa théodicée sur un Être suprême, unique ; mais cet être suprême n’est pas le dieu des catholiques. Ainsi que l’a dit fort justement Mgr Meurin, « le gnosticisme, c’est le christianisme kabbalisé ».

Aussi, l’on sent bien toute la perversité juive au fond de cet amalgame d’insanités.

L’homme, constitué comme il vient d’être dit, vit dans une ignorance profonde de sa nature et de son origine ; qui donc l’instruira ?… Christos, envoyé par la Sophia, se fait homme : il dérobe une âme à l’aveugle Démiurge et se forme un corps dans le sein d’une femme nommée Marie ; au moment de son baptême par Jean le Précurseur, l’éon Jésus-Soter descend en lui, et voilà pourquoi le Messie s’est appelé Jésus. Mais l’éon, après avoir révélé à l’homme la formation de l’Ogdoade, de la Décade et de la Dodécade, abandonne son corps, vile matière, remet son âme au réservoir commun de l’animalité, se sépare du Messie et rentre au plérome ; c’est ce qui explique, dit Valentin, les défaillances du Messie, à l’approche de sa mort. Cet abominable blasphème contre les mystères de la Passion de N.-S. démasque bien la haine de Satan s’épanouissant dans le valentinianisme.

La conclusion du système est que les hommes sont divisés en trois classes, chez lesquelles l’un des trois éléments domine : les hyliques, ou hommes matériels, qui sont les idolâtres ; les psychiques, qui sont les chrétiens vulgaires, ne connaissant que le Démiurge et l’adorant à tort comme Dieu (ainsi Jéhovah n’est que le Démiurge, le Dieu que les catholiques adorent n’est que le Démiurge) ; et les pneumatiques, qui sont les gnostiques, chrétiens supérieurs illuminés par l’éon Christos, éclairés par la gnose, arrivés, grâce à cette doctrine, à la perception du Bythos, du Dieu Absolu. Lorsque la gnose aura été adoptée partout, l’élément spirituel sera entièrement développé parmi les hommes ; ce sera la fin du monde, c’est-à-dire la cessation de la période de trouble, le rétablissement final qui permettra à l’éon Jésus-Soter de reconduire dans le plérome la mère de la vie, Akhamoth, escortée des hommes pneumatiques ; le Démiurge demeurera sur les confins du plérome, dans la compagnie des psychiques qui ne se seront point convertis à la gnose ; quant aux hyliques, ils