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« J’entends par liquidation sociale : l’expropriation, en droit, de tous les propriétaires actuels, par l’abolition de l’État politique et juridique, qui est la sanction et la seule garantie de la propriété actuelle et de tout ce qui s’appelle le droit juridique ; et l’expropriation en fait, partout et autant qu’elle sera possible, et aussi vite qu’elle sera possible, par la force même des événements et des choses.

« Quant à l’organisation postérieure : considérant que tout travail productif est un travail nécessairement collectif, et que le travail que l’on appelle improprement individuel est encore un travail produit par la collectivité des générations passées et présentes, je conclus à la solidarisation des communes, d’autant plus que cette solidarisation implique l’organisation de la société de bas en haut.

« Je suis, par conséquent, un antagoniste résolu de l’État et de toute politique bourgeoise de l’État.

« Je demande la destruction de tous les États, nationaux et territoriaux, et, sur leurs ruines, la fondation de l’État international des travailleurs. »


Cette proposition, dans le congrès de Bâle, n’eut que quatre adversaires. Elle fut votée par 54 voix sur 58 votants. Ainsi donc, nous venons de voir la doctrine collcctiviste ; voilà bien ce qui est déclaré publiquement.

Mais, ne l’oublions pas, l’Alliance collectiviste cachait les anarchistes, les Frères Internationaux du troisième degré. Bakounine, qui faisait cette déclaration publique du collectivisme, était, d’abord, et avant tout, anarchiste.

Après la doctrine publique, voyons maintenant la doctrine secrète ; voyons les statuts secrets du comité central des Frères Internationaux. Cette sélection constituant la direction du grand parti cosmopolite de l’anarchie n’est guère connue en Europe, si ce n’est en Russie. C’est seulement lors du procès Netchaïef (juillet 1871) qu’a été faite la découverte de cette organisation ; or, il n’en a été nullement parlé dans les journaux. En France, notamment, on était attristé par les suites de la guerre ; on jugeait les communards, et l’on s’attachait surtout à ce qui touchait directement aux actes de la grande insurrection parisienne.

Voici donc quelques extraits de ces statuts :


Les Frères Internationaux n’ont d’autre patrie que la Révolution universee, d’autre pays étranger ni d’autre ennemi que la réaction.

Tous les Frères Internationaux se connaissent. Il ne doit jamais exister de secret politique entre eux.

Aucun ne pourra faire partie d’une autre société quelconque sans le consentement positif de son comité, et, au besoin, quand celui-ci l’exige, sans le consentement du comité central ; et il ne pourra en faire partie que sous la condition de leur découvrir tous les secrets qui pourraient les intéresser soit directement soit indirectement.

Chacun doit être sacré pour tous les autres, plus sacré qu’un frère de naissance.