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Quoiqu’il en soit, chacun sait que la Maçonnerie Française traverse une crise. Elle se dépouille d’une enveloppe ancienne et cherche à revêtir une forme nouvelle. Les Maçons se divisent en deux camps, selon les sympathies qui les attirent, soit vers le passé, soit vers l’avenir. Quant au présent, ils le subissent comme un état transitoire : mais nul ne voudrait s’y maintenir.

Tout dans l’Ordre Maçonnique tend donc vers une disjonction qui pourrait bien aboutir à une dissolution définitive, si les Maçons ne savent prendre une détermination énergique, pour recomposer solidement sur de nouvelles bases ce qui est autrement menacé d’une décomposition complète. Rien dans ces conditions ne peut être aussi funeste que de continuels atermoiements, qui alanguissent les forces et lassent les meilleures volontés.

Ne craignez donc pas, mes Frères, de brusquer une solution, et puisque vous avez la prétention de marcher en avant, faites-le sans hésiter. N’attendez pas, en restant sur place, que vous soyez écrasés et ensevelis sous les décombres de l’édifice que vous avez ébranlé. Et puisque vous ne voulez pas le rétablir sur ses anciennes bases, hâtez-vous d’en sortir pour vous construire une nouvelle demeure sur d’autres plans et avec d’autres matériaux.

Que risquez-vous en entrant dans cette voie ? La Maçonnerie du Grand Orient de France n’est-elle pas déjà mise au banc de la Maçonnerie Universelle ? Ayez donc le courage de vos opinions, acceptez franchement la situation qui vous est ainsi faite, et profitez de la latitude qui vous est laissée, pour vous organiser selon vos véritables besoins.

Relisez le discours de clôture du dernier Convent. Le Frère Doumer y trace magistralement le programme qui s’impose à notre Institution à l’heure actuelle. Vous verrez qu’il n’y est pas question de Symbolisme, lequel devient gênant et encombrant, dès qu’il ne s’agit plus de se livrer à des études occultes ; mais d’entreprendre, au contraire, l’examen des réformes politiques et sociales bonnes à introduire dans nos Institutions profanes. Ces dernières études sont certainement davantage dans vos goûts et s’accordent mieux avec vos aptitudes : je ne puis donc que vous encourager à vous y livrer avec ardeur, en laissant à d’autres Les Recherches Cabalistiques et les Travaux Théurgiques dont vos Rituels renferment le mystérieux Enseignement.

À défaut d’Initiés, vous serez alors des Maçons ; et ceux qui flétrissaient de leur mépris les Initiés apocryphes, seront les premiers à respecter et à saluer de leurs encouragements des Maçons authentiques simples et modestes, mais vrais ouvriers du Progrès.

Comme conclusion pratique, je propose à la Respectable Loge les Amis Triomphants : 1o  De continuer ses Travaux selon les anciens Rituels, jusqu’à ce qu’ils soient remplacés par une œuvre sérieusement en rapport avec les besoins de la Maçonnerie actuelle ; 2o  d’informer officiellement le Conseil de l’Ordre de la décision prise par une planche, dont j’aurais dans ce cas la faveur de soumettre, la rédaction à votre approbation ; 3o  d’adopter comme sujet d’études les questions purement maçonniques, et de s’occuper spécialement de l’élaboration d’un projet de réorganisation générale du Grand Orient de France, en vue de la réalisation du programme tracé à la Maçonnerie Française par le Frère Doumer, dans le discours de clôture du Convent de 5887.


Le plus clair résultat de l’innovation du Grand Orient de France a été