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que l’autre nage dans l’abondance sans rien faire. — Nul n’a pu, sans crime, s’approprier exclusivement les biens de la terre ou de l’industrie. — Dans une véritable société, il ne doit y avoir bi riches ni pauvres. — Les riches qui ne veulent pas renoncer au superflu en faveur des indigents, sont les ennemis du peuple. — Le but de la Révolution est de détruire l’inégalité et d’établir le bonheur commun. — La Révolution n’est pas finie, attendu que les riches absorbent tous les biens et commandent exclusivement, tandis que les pauvres travaillent en véritables esclaves, languissent dans la misère et ne sont rien dans l’État. — La loi agraire ou le partage des terres ne fut que le vœu de quelques peuplades mues par leur instinct plutôt que par la raison. La véritable organisation, c’est la communauté des biens. Plus de propriété individuelle des terres. La terre n’est à personne, les fruits sont à tous, sous l’obligation du travail, etc. »

Telle est, dans ses grandes lignes, l’utopie de Babeuf. Les anarchistes modernes ont puisé là les principaux articles de leur catéchisme,

Après ces deux ancêtres de l’anarchie, voici le père : Proudhon. Celui-ci est encore un franc-maçon, et l’un des plus honorés dans la secte.

Proudhon a résumé la théorie dans trois aphorismes tapageurs. Son système est des plus simples ; il renferme tout son socialisme dans une trilogie de destructions. Il nie la nécessité du gouvernement de l’État ; à cette négation, il joint l’obligation de détruire la propriété, de supprimer le capital, et l’obligation de faire la guerre à Dieu. Donc, anarchie, anticapitalisme, antithéisme. Les trois parties, selon lui, sont inséparables. L’État, c’est l’absurde ; la propriété, c’est le vol ; Dieu, c’est le mal. Voilà.

L’anarchiste, comme on le voit, dérive du collectiviste ; c’est un communiste qui he veut aucune direction quelconque. Comme le collectiviste, il veut faire table rase de la société moderne ; mais il entend ne créer aucune organisation. Détruisons tout ; chacun se débrouillera ensuite comme il lui plaira.

Puisque la propriété, c’est le vol, quiconque possède est un criminel. Si vous avez acquis une fortune par votre épargne et par votre intelligence, vous êtes un voleur au même titre que celui qui à édifié sa richesse sur le dol, sur les spéculations malhonnêtes.

Voilà où l’on en est arrivé, en s’éloignant de la religion. On cherche dans l’extermination des propriétaires la solution de la question sociale. Malheureux égarés qui ne comprennent pas que l’Église seule possède le remède capable de guérir les maux des prolétaires, qu’elle seule peut faire régner la paix et le bonheur ici-bas ! On a arraché la foi de l’âme de ces infortunés ; on discute et l’on pérore, alors qu’il faudrait leur faire lire l’admirable encyclique Rerum novarum, leur faire méditer ces paroles que Léon XIII adressait le 2 octobre 1889 aux pèlerins ouvriers :