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essaient de faire revivre, l’astrologie, chez la plupart d’entre eux, occupe le premier rang.

Au nombre de ces astrologues spéculatifs, nous rencontrons des noms de philosophes, tels que celui du savant Ph. Lebas, de l’Institut, et de grands écrivains romanciers, comme Balzac. La malice, l’astuce du démon est si grande, qu’il en est arrivé à brouiller sur ce point les idées de M. de Mirville, qui était cependant un homme clairvoyant et un catholique convaincu.

En effet, tout en répudiant de toutes ses forces l’ancienne théorie fataliste des astrologues, tout en refusant de voir dans l’astrologie une influence physique ou morale des globes célestes sur le physique et le moral de l’homme, M. de Mirville a cru à l’existence d’une communication spirite entre l’homme et des puissances célestes ou angéliques présidant à chacun de ces globes. Si je ne me trompe, c’est là une erreur, condamnée par l’Église. Il est vrai que M. de Mirville distingue, sur cette question, deux parties bien tranchées dans cette science mystérieuse, et il donne à chacune une inspiration tout opposée, celle de Dieu et celle du diable ; mais il oublie que l’Église n’a jamais enseigné que Dieu ait écrit dans les astres le livre des destinées : ceux qui sont inspirés par Satan sont seuls à croire à l’écriture des étoiles. Si l’on met donc, comme de juste, sur le compte du diable tout ce qu’il y a d’obscur et d’incompréhensible dans le grimoire hermétique des astrologues, il demeure évident que c’est lui, Satan, qui est l’auteur de cette pseudo-science, et l’on ne saurait y adjoindre, même pour la part la plus minime, la collaboration de Dieu, dont parle M. de Mirville.

Ce qu’il y a de sûr aussi, c’est que la résurrection de ces difficiles grimoires n’est pas de nature à avoir la moindre influence sur le commun des esprits qui n’auront jamais ni le temps ni la patience de les déchiffrer ; en quoi, ils feront acte de bon sens.

L’astrologue Cardan, par exemple, a laissé un calcul au moyen duquel chacun peut prévoir la bonne ou la mauvaise fortune de toutes les années de sa vie. Rien assurément ne serait plus précieux et suivi avec plus d’empressement qu’un pareil calcul ; oui, mais à condition que ce calcul soit exact et intelligible. Or, le voici, tel qu’il nous est donné dans une de ces revues d’occultisme, où l’astrologie joue un si beau rôle (l’Initiation) : « Pour savoir la fortune d’une année, il faut résumer les événements de celles qui l’ont précédée par 4, 8, 12, 19 et 30. Le nombre 4 est celui de la réalisation ; le nombre 8, celui de Vénus ou des choses naturelles ; le nombre 12, qui est celui du cycle de Jupiter, correspond aux réussites ; le nombre 19, au cycle de la Lune et de Mars ; le nombre 30 est celui de Saturne ou de la Fatalité. » Nous n’avons pas de peine à comprendre, après cet oracle, comme le dit sagement l’auteur de l’article cité, « que Cardan était un homme mal équilibré, et que dans son œuvre il y a beaucoup à prendre, et encore plus à laisser.