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naissance, le mouvement des astres et l’état du ciel ; mais vouloir en déduire la prédiction du caractère, des actes et de la destinée de l’enfant, c’est une grande erreur et une grande folie… Consulter les mathématiciens et les aruspices, c’est forniquer avec les démons. »

Saint Augustin, dans ses Confessions (chap. iii), se repent amèrement d’avoir cherché dans sa jeunesse l’entretien des épieurs de planètes qu’on appelle Mathématiciens, que le christianisme condamne et rejette.

En dépit des condamnations et des anathèmes de l’Église, l’astrologie ne continua pas moins, dans tout le cours du moyen-âge, de recruter de nombreux adeptes ; les rois et les princes donnèrent eux-mêmes l’exemple. Charles V, roi de France, fait venir d’Italie un des astrologues les plus célèbres du temps, le père de Christine de Pisan, contre lequel Gerson a écrit son Traité contre les Astrologues. Au xvie siècle, le nom de Nostradamus est aussi célèbre que celui de Catherine de Médicis ou de Charles IX, dont il fut l’astrologue.

Jusqu’en plein xviiie siècle, l’astrologie a compté en France de chaleureux partisans ; un des plus savants hommes d’alors, le comte de Boulainvilliers, menait de front avec les études historiques celle des grimoires de l’astrologie[1], malgré les railleries de Voltaire, à qui il avait prédit, de concert avec un astrologue italien, Colonna, qu’il mourrait à l’âge de trente-deux ans. « J’ai eu la malice, écrivait Voltaire en 1757, de les tromper déjà de trente ans. Je leur en demande humblement pardon. »

Il était curieux de donner ici l’opinion de Voltaire, dont l’impiété était basée sur le scepticisme ; il est vrai que, s’il ne croyait pas au diable, c’était précisément par son incrédulité que le diable le tenait et finit par l’avoir tout à fait.

C’était sans en demander pardon aux astrologues de son temps, que l’astronome Bailly condamnait en bloc l’astrologie de tous les temps, comme une prétendue science « dont les fripons se sont servis pendant tant de siècles pour tromper les curieux et les faibles. »

Cependant, cette divination se distingue des autres dont nous avons parlé, en ce sens qu’elle n’est pas à la portée du premier charlatan venu, la science des horoscopes nécessitant de la part de ses adeptes une étude comparable à celle d’un mathématicien à la recherche d’un des problèmes les plus compliqués de l’algèbre.

Cette science des horoscopes, qui est la partie principale de l’astrologie, est si hérissée de calculs, de combinaisons et de formules hiéroglyphiques, qu’il

  1. Il a laissé manuscrit un grand ouvrage intitulé : La Pratique abrégée des jugements astrologiques sur les nativités, pour lequel il avait réuni plus de 200 volumes sur la philosophie hermétique et les sciences occultes. C’était, comme on le voit, un fervent luciférien de son époque.