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ches. Ce ne fut que le lendemain, dans l’après-midi, que l’on découvrit, caché sous des gerbes de paille, dans une écurie de la ferme, le corps de l’enfant entièrement nu, affreusement mutilé. La tête en avait été détachée au moyen d’un instrument tranchant, et ne put être retrouvée.

« De profondes entailles, faites sur l’une des épaules, indiquaient qu’on avait eu la pensée de couper le corps en morceaux pour le faire disparaître. Le crime était constant ; mais quel était l’assassin, et quel intérêt avait pu armer son bras ?… La pauvre victime était âgée de onze mois à peine.

« Les soupçons ne tardèrent pas à se porter sur un homme qui était au service de la ferme. Ses antécédents étaient faits pour les éveiller. Voleur d’habitude depuis son enfance, il avait été condamné pour vol à deux ans de prison, et pour se soustraire aux recherches de la justice, il avait changé de nom ; il avait substitué à son nom de Vautrin celui de Morisot. Cet homme est âgé de vingt-quatre ans. Il était taciturne, recherchait l’isolement, et avait plusieurs fois donné des preuves d’une froide cruauté.

« À la nouvelle de la disparition de l’enfant, Vautrin avait pâli, et, au lieu de se livrer comme tous à des recherches actives, on l’avait vu morne et préoccupé, cherchant à diriger les soupçons sur un ancien domestique de son maître, qui aurait pris l’enfant pour lui couper la tête et aller avec cette tête dans les châteaux.

« Mais cet étrange propos, émis avant que personne sût si la tête de l’enfant avait été mutilée, était une révélation. Il indiquait le mobile et l’intérêt du crime. Vautrin avouait, en effet, le lendemain, qu’il avait entendu dire que le crâne d’un enfant assassiné avait la propriété de rendre invisible celui qui le portait, et de permettre à un voleur qui s’en ferait une lanterne, de pénétrer impunément dans les habitations. Vautrin croyait à cette odieuse superstition ; ainsi s’expliquaient l’intérêt du crime et la mutilation. »

Vautrin fut arrêté, et l’interrogatoire qui suivit ne vint que trop confirmer les soupçons qu’on avait eus sur lui. Les dépositions des témoins furent si accablantes, que le verdict du jury fut affirmatif sans circonstances atténuantes. En conséquence, Vautrin fut condamné à la peine de mort et exécuté.

Sans avoir complètement disparu, l’anthropomancie est donc un cas exceptionnel dans les annales du crime. En outre, elle peut échapper souvent à la constatation. Bien des disparitions inexpliquées sont, à bon droit, suspectes dans ce sens.

Enfin, tout le monde a présente à la mémoire cette série de crimes commis récemment en Angleterre, qui ont épouvanté le monde civilisé, et dont l’auteur, désigné sous le nom de Jack l’Éventreur, est resté inconnu, en réalité. En considérant la façon dont procédait ce mystérieux assassin, tuant à tort et à travers des femmes, les premières venues, et leur arrachant