Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 1.djvu/508

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tendues philosophiques tendant à l’athéisme, et jusqu’à ces loges exclusivement israélites, où le flambeau doit se rallumer pour éclairer et régénérer les pays trop lents à accepter la pleine lumière maçonnique.

Nous trouvons dans le même article un récit qui peut donner une idée des épreuves en usage dans les loges, pour attacher à l’Ordre le néophyte par la crainte et la terreur et qui montre en même temps que la maçonnerie est aux antipodes de l’antisémitisme.

« À l’époque où le triste épisode de Damas excitait l’attention de toute l’Europe, un habitant d’une des villes du midi de la France déclara tout haut en plein café que, selon lui, le père Thomas avait été traîtreusement assassiné par les juifs de Syrie ; quelques hommes raisonnables tentèrent en vain de combattre cette opinion ; il y persévéra avec entêtement, en y ajoutant des expressions injurieuses pour les israélites en général. Or, ce soir-là même, notre homme se présentait à une loge maçonnique de la ville. Après les premières épreuves, on lui fit prêter le serment d’usage de ne jamais révéler les mystères de l’ordre, et pour que l’obligation qu’il allait contracter se manifestât à lui dans toute son importance, il fut conduit, toujours les yeux bandés, jusqu’à la porte d’une prison souterraine. Là, son bandeau lui fut ôté, et, à la lueur d’une torche à la flamme vacillante, il entra dans un cachot infect, et sur la paille humide il vit étendu en un coin obscur un israélite de la ville, lequel, enchaîné prisonnier, have, exténué, lui raconta d’une voix lamentable comment, accusé d’avoir révélé quelques secrets de la maçonnerie, il avait été condamné à mort par l’aréopage de l’ordre ; et comme notre initié frémissait et s’indignait à ce récit, le frère terrible apparut subitement à ses côtés, plaça un glaive dans ses mains tremblantes, et lui dit d’une voix sévère : « Ce parjure a mérité la mort ! Aux termes de nos règlements, le premier profane qui se fait recevoir chez nous après qu’un arrêt de mort est rendu doit l’exécuter, pour nous donner un gage de son obéissance et de sa fidélité. Frappe ! Il le faut ! »

« — Qui ? moi, s’écria le récipiendaire, devenir assassin ? Jamais ! Je ne reconnais pas votre tribunal de sang ; maintenant vous me faites horreur, et j’aurais honte d’être reçu parmi vous.

« — Il n’en est plus temps, tu nous appartiens. »

« Aussitôt le candidat maçon est saisi par des bras vigoureux, et, malgré ses efforts, il est porté dans la salle des réunions. Mais là, un spectacle plus épouvantable encore s’offre à ses regards : au milieu d’un immense plateau gît, pâle et livide, la tête du malheureux prisonnier, nageant dans une mare de sang et les yeux fermés. Frappé d’horreur, le récipiendaire a à peine la force de s’écrier :

« — Vous êtes des infâmes ! Je le vois, on m’a trompé, ma vie vous appartient ; mais jamais vous n’aurez mon serment, car vous venez d’assassiner