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historiens, qu’ils y ont perdu en grande partie ce qui faisait leur force, leur grandeur et leur originalité : leur foi et l’intégrité de leurs mœurs traditionnelles.

L’affranchissement des juifs de France devait être le signal de l’affranchissement général de la race israélite dans tous les pays où les principes de la Révolution pénétrèrent à la suite de nos armées[1] : « C’est parce que les principes politiques, proclamés par la Constituante, ont prévalu peu à peu dans tous les États du monde civilisé que l’émancipation légale des juifs n’est pas non plus restée confinée à notre pays[2]. » C’était une application forcée de ce prétendu grand principe qui avait inspiré les principaux meneurs de la Révolution, et que Duport, le principal auteur avec Mirabeau de l’émancipation juive, formulait ainsi en 1790 dans une réunion du comité de propagande : « M. de Mirabeau a très bien établi que l’heureuse révolution qui s’est opérée en France doit être et sera pour tous les peuples de l’Europe le réveil de la liberté, et pour les rois le sommeil de la mort. »


Mais voyons, maintenant, quels ont été les résultats de l’émancipation révolutionnaire et maçonnique des juifs.

Emancipés, affranchis par la Révolution, les juifs, tout en cherchant à y dominer, ne cessèrent de se proclamer ses obligés, ses hommes-liges. « Les hommes de la Révolution, écrit l’un d’eux, M. Léon Kahn, l’historien des Juifs à Paris, nous ont aidé à conquérir la place que nous occupons dans la société ; les israélites ne l’oublient pas. »

Pendant les jours néfastes de la Terreur, ils ne commirent pas d’imprudences. Avec leur flair naturel, ils avaient compris qu’un régime édifié dans le sang ne pourrait durer, et, tout en étant bons sans-culottes, ils se gardèrent bien de se compromettre. Aussi, nous ne les voyons pas figurer dans le comité de sûreté générale ni au tribunal révolutionnaire. Plus avisés, ils demeurent au second plan. Ils se mêlent aux clubs, mais parmi les auditeurs, jamais ou très rarement au nombre des orateurs ; ils excitent les autres et se gardent bien de se mettre en avant. Par exemple, là où il y a des situations lucratives, ils s’insinuent et réussissent à les obtenir ; on en trouve un grand nombre parmi les commissaires de la guerre ; ils spéculent sur la vente des biens nationaux. Que de fortunes juives créées en peu de temps pendant la période sanglante ! Pour la guerre, des millions et des millions sont indispensables ; l’argent en est le nerf ; mais, dans le mouvement des fonds, leurs doigts crochus savent retenir bonne partie des fortes sommes.

  1. Partout où elles pénétraient, les armées françaises de la Révolution émancipaient les juifs ; l’armée, recrutée dans les provinces rhénanes, comptait un grand nombre de soldats juifs, dont plusieurs officiers. Il existe un poème épique en hébreu, intitulé : l’Empereur Napoléon, qui a pour auteur le père du compositeur Halévy, et qui passe chez les juifs pour un chef-d’œuvre.
  2. T. Reinach : Histoire des Israélites, page 325.