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après m’être assuré de quelques frères zélés, j’ai élevé sur cet orient un temple à la gloire du Grand Architecte, renfermant les cinq ordres parfaits dont je suis dépositaire sous la constitution de Charles Stuart, roi d’Écosse, d’Irlande et d’Angleterre, grand-maître de toutes les Loges régulières répandues sur la surface de la terre, aujourd’hui sous la protection de Georges Guillaume, roi de la Grande-Bretagne et sous le titre de la Grande Loge de la Perfection Élue et Écossaise.

« Je prends la liberté de vous envoyer copie de la traduction de mes pouvoirs, qui sont en idiôme anglais, avec tous les caractères qui les accompagnent, et Pacte de Constitution de mon temple, élevé sur cet orient, signé de tous les membres qui le composent aujourd’hui. Je joins aussi la liste de ceux qui composent le temple que j’ai élevé sur l’orient de Toulouse, où j’avais laissé le frère marquis de Saint-Paulet, pour mon député, dont l’absence actuelle m’a engagé de lui substituer depuis le 14 du courant le frère de Lapeyrie, Trésorier de France, pour lequel je vous demande la réparation qu’exige l’indécent procédé des trois Loges de Saint-Jean réunies à Toulouse.

« Signé : Dom Martinez-Pasqualis. »

Une pièce de ce genre jette sur la carrière maçonnique de dom Martinez la plus vive lumière. Elle nous révèle la source des pouvoirs maçonniques dont il jouissait ; en effet, le dernier Stuart, au lieu d’attendre la fin des malheurs de sa famille en mettant sa confiance en Dieu, se donna au diable et fut l’un des plus actifs propagateurs de la franc-maçonnerie, dont il créa plusieurs hauts-grades ; il rêvait la restauration de son trône par l’appui de toutes les forces maçonniques de l’Europe.

Ces pouvoirs avaient été confiés directement le 20 mai 1738 au père de notre juif, dom Martinez-Pasqualis, écuyer, âgé de 67 ans, né à Alicante en Espagne, et, pour lui succéder, à son fils aîné Joachim dom Martinez-Pasqualis, âgé de 28 ans, natif de la ville de Grenoble en France. C’est ce que nous apprennent les lettres-patentes, dont copie était jointe à la lettre ci-dessus[1].

Cette lettre et ces pouvoirs étaient envoyés par dom Martinez à la Grande Loge de Paris, dans le but de faire reconnaitre par elle les fondations de l’émissaire des Stuart, jusqu’alors considérées comme étrangères à la maçonnerie française. Martinez fut trompé dans son attente ; tout en exprimant son profond respect pour la Royale Loge de Stuart, la Grande Loge de France lui déclara qu’elle ne pouvait reconnaître des frères ayant des Constitutions des loges étrangères, ni lier de correspondance avec eux

  1. Aucun biographe de Pasqualis, même des plus récents, n’a tenu compte de ces documents essentiels, excepté le P. Deschamps dans son remarquable ouvrage : les Sociétés secrètes.