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existence est révélé à certains frères privilégiés ; on a compris, d’autre part, ce qu’il faut entendre par « se parfaire dans l’art de vaincre ses passions », qui est le terme consacré pour exprimer maçonniquement le but de la création des ateliers de cette espèce.

Mais nous savons que les sœurs maçonnes dont nous venons de parler ne sont pas les seules mises en œuvre dans la secte. En dehors de la catégorie des pseudo-sœurs (femmes ou parentes des frères) qui sont là uniquement pour servir de paravent aux gros bataillons des initiées aux mystères d’Isis, il y a, au-dessus des unes et des autres, un troisième genre de sœurs, non pas recevant une initiation spéciale, mais placées dans une situation supérieure qui s’oppose à toute dégradation de leur part.

Ce sont, en général, les filles de hauts-maçons, quelquefois d’autres parentes de parfaits initiés. Elles savent, voilà ; personnellement, elles sont respectées ; si l’on peut se servir de ce mot, ce sont des « sœurs-chefs ». Palladistes, elles sont le plus souvent à la tête des loges androgynes ordinaires, les dirigeant comme grandes-maîtresses, et se réservant pour les sacrilèges des triangles. Ou bien, ce sont des dames du monde, ayant un salon politique ; elles appartiennent secrètement à la maçonnerie ou donnent un certain lustre à la catégorie des pseudo-sœurs, auxquelles elles se mêlent.

On les trouve ainsi dans tous les rites féminins, et même parmi les femmes de francs-maçons. Il est facile de comprendre que leur rôle dans l’Ordre n’est plus celui des malheureuses dont je me suis occupé précédemment ; elles ne sauraient, en aucune façon, leur être assimilées.

Aussi, n’y a-t-il aucun inconvénient à les nommer, elles.

Ce sont des femmes d’élite, d’une haute intelligence, mondaines, si l’on veut ; mais c’est tout, à ce point de vue. Le type le plus célèbre de ces maçonnes supérieures est l’infortunée princesse de Lamballe. On peut citer encore Mme  de Genlis, Mme  de Staël, qui ont exercé une réelle influence au profit de la propagande des idées maçonniques. De nos jours, et pour ne parler ici que de la France, je rappellerai le nom de Mme  Edmond Adam (Juliette Lamber), éminemment respectable. En Espagne, c’est Dona Maria-del-Olvido de Bourbon, fille du duc de Séville, aujourd’hui senora Maquieria y Oyangurcu, qui est grande-maîtresse et propage le libéralisme dans l’aristocratie de son pays. Dans le Palladisme, c’est certainement miss Diana Vaughan, qui était la forte tête, le cerveau féminin qui inspirait bien souvent les chefs de la haute-maçonnerie ; c’est pour cela que sa démission récente a été un gros évènement dans le monde sectaire.

En second ordre, mais toujours parmi les adeptes qui font exception à la règle isiaque, il faut noter telles et telles femmes distinguées, qui ne s’affichent pas comme maçonnes, mais dont les œuvres, lorsqu’elles sont dans la littérature, trahissent l’affiliation à la secte.