Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 1.djvu/397

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à la bourgeoisie et au clergé. On choisira, pour l’attentat, un jour où M. Dumay sera à la campagne, et Y*** aura à faire éclater la bombe au domicile particulier du directeur des cultes. Le coup fait, si son auteur n’a pas été arrêté immédiatement, Y***, ainsi que N***, seront dénoncés aussitôt à la police par lettre anonyme, et les journaux, grâce aux aveux de N***, dont la qualité maçonnique sera toujours tenue secrète, pourront publier, avec grand scandale, le « crime anarchiste commis à l’instigation des cléricaux ». À l’instruction, le F∴ N*** reconnaîtra que l’évêque X*** savait que l’argent recueilli pour Y*** était destiné au complot. Si cette affaire réussit, le compagnon anarchiste, au cas où il y aura eu des victimes de l’explosion, sera guillotiné ; ce qui est tout à fait indifférent à la maçonnerie. N***, qui n’aura été qu’un intermédiaire et qui aura manifesté un grand repentir à l’audience, en accusant l’évêque X*** d’avoir organisé le crime, aura des circonstances atténuantes et s’en tirera avec quelques années de prison ; on le fera évader, sans tambour ni trompette, et la maçonnerie lui donnera une somme en récompense de ses services et pour lui permettre de s’établir à l’étranger. Quant à l’évêque, il faudra qu’il soit bien fort pour qu’il se tire de là, étant donné que l’on s’arrangera pour que le tirage au sort du jury désigne, à la session où l’affaire sera jugée, trente-six jurés exclusivement francs-maçons. Ce sera ainsi un coup terrible porté au cléricalisme, un scandale formidable, et l’on pourra noircir à plaisir les prêtres catholiques aux yeux de la multitude. »

Une histoire de ce genre, — je me hâte de le dire, imaginaire, quant à présent, — n’a aucune chance de se trouver dans une revue antimaçonnique, par la seule raison que les frères trois-points n’en sont pas encore là en france. Mais il ne faudrait pourtant pas croire que j’exagère la perfidie des sectaires : ils sont parfaitement capables d’un machiavélisme de cette force ; l’affaire Wiesinger, dont M. De la Rive a dit quelques mots[1], en est une preuve historique, et le coup de poignard destiné à Bismarck n’avait pour but que de compromettre le R. P. Beckx, général de la Compagnie de Jésus, représenté comme ayant stipendié l’assassin.

Donc, en ce qui concerne actuellement la France, j’ai donné ci-dessus une pure et simple hypothèse, non pour montrer ici l’œuvre de la maçonnerie dans l’anarchisme, mais pour arriver à une démonstration, que je reprends.

S’il y avait lieu de publier dans un organe antimaçonnique une révélation de ce genre, il est évident que ce serait étouffer dans l’œuf l’abominable complot.

Mais que dirait le profane que je présentais tout à l’heure à mon lecteur ?

Il n’aurait pas une hésitation, vous pouvez en être certains ; il s’écrierait :

— Voilà une infâme invention des adversaires de la franc-maçonnerie

  1. La Femme et l’Enfant dans la franc-maçonnerie universelle, page 674.