Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 1.djvu/366

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

car ceux qui rêvent l’anéantissement de la liberté ont bientôt fait d’agir avec arbitraire. Alors, l’acte exercé contre l’homme en dehors des cas et sans les formes que détermine la loi est un acte tyrannique, contre lequel le citoyen opprimé a le droit et le devoir de se révolter, et si l’on veut agir contre lui par la violence il lui opposera légitimement la force.

« Dans une société libre, gouvernée par des administrateurs justes, les peines portées par la loi contre les citoyens qui se seront rendus coupables d’un délit ou d’un crime doivent être proportionnées à la faute, et, par leur nature, être utiles à la société.

« Il n’est pas de plus grand crime que celui de complot pour faire revivre la superstition et restaurer la tyrannie sacerdotale ; une société libre étant pour chacun de ses membres la meilleure des mères, travailler au retour du despotisme des prêtres et à la renaissance des dogmes maudits, c’est se rendre le pire des parricides ; celui qui serait criminel à ce point, plus coupable que la vipère dénuée de raison piquant le sein qui l’a réchauffée, devra être retranché de la société, c’est-à-dire mis à mort.

« Par droit de propriété, il faut entendre, celui que tout citoyen possède naturellement de disposer comme il lui convient du produit de son travail. Le travailleur économe doit être libre d’acquérir et de veiller à l’augmentation de son bien-être ; mais sont mal acquis les biens obtenus par la spéculation ou par l’exploitation abusive d’autrui, et la loi doit avoir la prévoyance nécessaire pour que toute spéculation ou exploitation abusive soit rendue impossible. Des sages mesures que les législateurs auront à fixer dans ce sens, il résultera que la société libre, fondée sur l’égalité et la justice, ne verra pas ces fortunes scandaleuses, honte des siècles précédents, source de paresse chez les uns et de misère infligée fatalement aux travailleurs parias.

« Chacun est propriétaire de soi-même ; mais la personnalité humaine n’est pas une propriété aliénable. On a le droit d’engager ses services et son temps, mais non de se vendre ni de se céder en aucune manière. Tout contrat, même sous forme de vœu, aliénant la personnalité d’un individu et soumettant sa volonté à l’arbitraire d’un autre, est illégal.

« L’intérêt général passant avant l’intérêt particulier dans une société libre, un citoyen peut être exproprié, lorsque la nécessité publique le commande ; mais c’est le seul cas où un membre de la société peut être privé de tout ou partie de sa propriété. D’autre part, la justice veut que le citoyen exproprié au nom de l’intérêt suprême de tous soit préalablement et convenablement indemnisé.

« L’indemnité en cas d’expropriation ne doit avoir lieu que s’il s’agit de biens honnêtement acquis, cela est de toute évidence. C’est pourquoi, lorsque la société des hommes libres se constituera, un de ses premiers actes de salut public sera de déposséder les ministres de la superstition et tous les