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tions et recolements des accusés ; alors, un esprit lui fait connaître l’endroit où est déposé le sort ; et au moment où il le jette au feu, il lui est aussi révélé que Pierre Hocque en est l’auteur et qu’il expire au même instant à Paris dans sa prison.

En effet, à la même heure où Bras-de-Fer levait la charge sur les chevaux et les vaches, Pierre Hocque mourait dans des convulsions étranges, comme un possédé, sans vouloir se confesser. Bras-de-Fer refusa de lever le sort sur les moutons, parce qu’il lui fut révélé que les enfants de Hocque en étaient les auteurs et qu’il ne voulait pas les faire mourir comme leur père.

Ce fait donna lieu à un second procès. Décrétés et arrêtés, les enfants Hocque et leurs complices furent trouvés saisis de caractères et manuscrits pour composer des charges, et Bras-de-Fer fut reconnu chef de la cabale des bergers. Par sentence du 23 janvier 1688, ce dernier, E. Jardin et le Petit-Pierre furent condamnés à être pendus et brûlés, les deux fils et la fille de Hocque à un bannissement perpétuel. Mais cette sentence fut infirmée, et, par arrêt de la Cour du 12 mars, les trois premiers furent seulement condamnés aux galères à perpétuité, et les enfants de Pierre Hocque bannis pour neuf ans.

Cet arrêt excita la haine des condamnés.

Pendant le cours du procès qui dura huit mois, il ne périt plus de bestiaux ; mais dès que les enfants Hocque furent sortis de prison, au lieu de se soumettre au bannissement, ils se rendirent à Chevri, près de Pacy, chez des parents, arrosèrent la charge de vinaigre, et cette même nuit la mortalité recommença : il mourut huit moutons. Le sieur Visier envoya ses bestiaux chez son beau-père, elle cessa ; il en prit à moitié d’un sieur Bourdin ; dès que les enfants Hocque le surent, ils périrent.

Cette récidive donna lieu à un troisième procès. Réintégrés en prison par sentence du 31 octobre 1689, ils furent condamnés à mort. Sur l’appel, la Cour infirma la sentence, et condamna les frères Hocque aux galères et leur sœur à un bannissement perpétuel. Cette clémence endurcit la nombreuse cabale des bergers qui continuèrent leurs maléfices contre Visier, lequel fut complètement ruiné.

Plusieurs bergers furent incarcérés ; on les trouva saisis de livres détestables. Confrontés et interrogés, ils avouèrent les faits. Visier seul avait perdu pour plus de 8.000 livres de bestiaux ; le fermier des Chartreux, en trois ou quatre ans, pour plus de 15.000 livres (somme énorme à une époque où un excellent cheval ne valait pas plus de 100 francs).

L’infamie va plus loin : de pauvres veuves sans défense ont été obligées de s’abandonner à leurs bergers qui les menaçaient de faire périr leurs troupeaux. Ils font des conjurations pour contraindre des femmes et des filles, et encheniller (c’est leur terme) ou faire mourir de langueur ceux qui leur