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faussent l’esprit des naïfs en les poussant à découvrir les secrets de leur avenir.

Une grande partie de ces pratiques, intimément liées au caractère des religions païennes, sont tombées en désuétude, grâce aux lumières apportées à l’humanité par le christianisme ; mais il semble que, dans ces derniers temps, surtout depuis la Révolution, dont le succès a donné espoir au prince des ténèbres, elles ont repris et reprennent tous les jours force et vigueur. Les journaux en sont même arrivés à donner les noms et adresses des prétendus devins et des sybilles à tant la séance.

Parmi les procédés les plus fréquemment employés à notre époque, il me faut citer la chiromancie, la cartomancie et l’onéirocritie, qui méritent quelques détails.

On y peut joindre la cléromancie ou rhapsodomancie, qui compte aujourd’hui de fervents amateurs chez nos nouveaux mages. C’est ainsi qu’un rédacteur d’un de ces organes de l’occultisme moderne qui ne peuvent être compris, en général, que par les initiés, énumérait il n’y a pas longtemps quelques-unes des expériences qu’il a faites de nombreux procédés de divination artificielle, et il citait avec une complaisance toute particulière celle des sorts dits virgiliens au moyen-âge, parce qu’alors Virgile était l’oracle favori des devins.

« Il y a, dit-il, une foule d’autres moyens et instruments artificiels de divination : sorts des dés, des saints, des évangiles, des lettres, sorts homériques et virgiliens, et même d’autres livres ; mais il est à remarquer que tous les livres n’y conviennent pas également. D’après les expériences nombreuses que j’en ai faites, l’Odyssée est préférable à l’Iliade ; l’Énéide donne aussi de bons résultats. J’ai eu souvent à me louer du petit Traité de l’Âme, de Cassiodore ; mais la Bible est encore ce qu’il y a de meilleur. Au surplus, c’est à chacun à se guider sur sa propre expérience. Il semble que les livres spirituels sont les meilleurs ; mais c’est peut-être, du moins en partie, question de personnes[1]. »

Il est à regretter que l’auteur ne nous ait pas fait part des révélations frappantes qu’il a puisées dans l’Odyssée ou le petit Traité de l’Âme, de Cassiodore. Mais ce qu’il faut surtout voir en ceci, c’est la constante préoccupation que les fils du diable ont de singer les choses saintes.

Chacun sait que rien ne vaut une bonne lecture de l’Imitation de Jésus-Christ, suivie d’une méditation, pour prendre conseil quand on est embarrassé dans certaines circonstances de la vie. Nous prions Dieu de nous éclairer, et nous ouvrons un de ces bons livres de piété, où l’âme se réconforte toujours ; mais ce n’est nullement pour y chercher les mystères de

  1. L’Initiation, 2e année, n° du 5 février 1889, page 105.