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« Cependant, en dépit des visites de ces ministres et de l’aversion profonde de ma tante, les frappements ne cessaient pas, et les meubles à leur tour se mirent en mouvement sans le secours d’un agent extérieur.

« La première fois que ce phénomène se produisit, j’étais dans ma chambre, occupé devant la glace à brosser mes cheveux ; je vis tout à coup, dans la glace, une chaise placée entre la porte et moi, s’avancer doucement dans ma direction. Ma première impression fut une grande frayeur, et je jetai les yeux autour de moi pour voir si je ne pourrais pas me sauver ; mais la chaise se trouvait entre moi et la porte, et elle avançait toujours à mesure que je la regardais : à un pied environ de distance, elle s’arrêta ; j’en profitai pour bondir par-dessus elle, me précipitai dans les escaliers, m’emparai de mon chapeau qui était dans le vestibule, et sortis pour méditer sur cet étonnant phénomène.

« Plus tard, pendant que j’étais tranquillement assis dans le salon, avec ma tante et mon oncle, la table, parfois les chaises et d’autres meubles se promenaient d’eux-mêmes dans la chambre, à la grande surprise et au grand dégoût de mes parents.

« Une fois, pendant que la table était ainsi en mouvement, ma tante prit la Bible de famille, et la plaçant sur le meuble, elle ajouta : « Voilà qui chassera le démon d’ici » ; mais, à son grand étonnement, la table s’agita d’une manière plus gentille, comme si elle eût été flattée de porter un tel fardeau. Alors l’irritation de ma parente n’eut plus de bornes ; bien résolue à mettre fin à ces mouvements, elle se plaça elle-même avec colère sur la table ; mais celle-ci s’éleva de nouveau au-dessus du parquet avec son vivant fardeau… »

« Ma seule consolation à cette époque, dit-il encore, était de voir une autre tante, une veuve, qui vivait tout près de là, et dont la sincère et vive sympathie fut une grande bénédiction pour moi. Chez elle, durant une de mes visites, le même phénomène se manifesta, et cette fois nous fîmes des questions qui furent intelligemment répondues. L’esprit de ma mère se communiqua à moi dans cette maison par l’avertissement suivant : « Daniel, ne craignez rien, mon enfant, Dieu est avec vous ; qui donc alors voudrait être contre vous ? Cherchez à faire le bien, soyez vrai et aimant, et vous prospérerez, mon enfant. Votre mission est glorieuse, vous convaincrez les infidèles, guérirez les malades, et consolerez ceux qui souffrent. »

« Ce fut la première communication que je reçus, et elle eut lieu la première semaine de ces mystérieuses visites. Je ne l’ai jamais oubliée, et je ne l’oublierai jamais. Ce fut aussi la dernière semaine que-je passai chez ma tante ; ses convictions religieuses ne purent soutenir plus longtemps la continuation de ces manifestations étranges, et elle considéra comme un devoir pour elle de m’engager à quitter sa maison ; ce que je fis. »

Nous savons que, par malice, Satan, usant à l’excès de la tolérance divine,