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LA PAUVRETÉ.


La voilà, dites-vous ? Quoi ! c’est la jeune fille,
Dont j’admirai naguère, au sein de sa famille,
Dans leur pure fraîcheur les attraits séduisans ?
Se peut-il que déjà cette fleur soit fanée,
Et qu’en passant dix fois, l’année
Ait vieilli ce front de seize ans ?

D’ordinaire à nous fuir la jeunesse est plus lente :
Quel vent funeste a donc touché la frêle plante ?
Quel froid hâtif surprit son feuillage mouillé,
Pour voir sitôt, privés de leur grâce infinie,
Sa feuille crispée et jaunie,
Et son calice dépouillé ?…

La pauvreté ! Vous tous qui, chers à la fortune,
N’avez subi jamais sa visite importune ;
Son image pour vous est un rêve imparfait ;
Mais nos foyers éteints, mais nos tables désertes,
Nos demeures aux vents ouvertes,
Sont les moindres maux qu’elle fait !