Page:Tastu - Poésies nouvelles, 3ème édition, 1838.djvu/13

Cette page a été validée par deux contributeurs.

PRÉLUDE.


Lasse enfin de courir, vagabonde pensée,
Ne reprendras-tu point ton allure passée ?
Ton pas doit-il fouler le pavé des chemins,
Et ta main, sans pudeur, toucher toutes les mains ?
N’as-tu pas regretté, dans tes labeurs profanes,
Forcée à te couvrir de grossiers vêtemens,
Ce merveilleux tissu, dont les plis diaphanes
Voilaient, sans les gêner, tes chastes mouvemens ?
Reviens, crois-moi, reviens, voyageuse étourdie ;
Lave tes pieds poudreux dans une onde tiédie ;
Reprends ta robe-fée, aux changeantes couleurs,
Tes joyaux de princesse et ton chapeau de fleurs.
Peut-être un ciel plus âpre et des sites plus rudes
Ont grossi les feuillets de tes cartons d’études ;
Et de vulgaires chants, à ton oreille amers,
De quelques frais motifs ont rajeuni tes airs !…
Mais, hélas ! aujourd’hui la harpe est incomplète,
Et le temps a soufflé sur l’oisive palette !