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Les puissants de l’état encombrent les degrés.
Pourquoi, lorsqu’une plainte, un seul cri de détresse
Peut attrister soudain le concert d’allégresse,
Pourquoi des prisonniers ?… Sous ces légers barreaux
S’agitent tristement de timides oiseaux ;
Ils s’efforcent à fuir, d’une aile effarouchée,
Cette pompe des rois qu’ils n’avaient point cherchée.
Pauvres petits captifs ! privés d’un bien si doux,
La liberté, que toute voix réclame,
De vos tyrans ne soyez point jaloux,
Chacun d’eux l’appelle en son âme,
Et des nobles acteurs de cet auguste drame
Aucun n’est plus heureux que vous !
Nul d’un libre loisir ne peut goûter les charmes :
L’immobile soldat est captif sous les armes ;
Son chef, le fer en main, brillant d’or et d’acier,
A l’ordre qu’il transmet doit plier le premier ;
Les spectateurs pressés dans cette vaste enceinte
S’imposent le fardeau d’une longue contrainte ;
Soumis au même joug, le pontife à l’autel
Cède aux liens dorés d’un devoir solennel.
Sous les réseaux du privilège,
Voyez ces fiers prélats, qu’enchaîne sur leur siège
L’honneur de consacrer les suprêmes serments ;
De leur pieux office alongeant les moments,
Le blême ennui qui les assiège
Au milieu d’eux se glisse et siège
Sous les mitres de diamants.

Ennui ! triste ennemi qu’aucun mortel n’évite,
Je ne vois que des jeux où ta langueur habite ;
Du prêtre à l’assistant tout ressent ton pouvoir,
Jusqu’au bras engourdi de ce jeune acolyte
Qui laisse échapper l’encensoir.
Déjà les douze Pairs, qu’en vain la Manche hermine
Revêt d’un éclat féodal,
Succombent à leur tour à ce charme fatal ;