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Faible jouet de sa malice oisive,
L’émail des champs s’effeuillait sous ses doigts.
 
« Pourquoi livrer d’inutiles offrandes
Aux vents jaloux, tandis qu’en leurs parvis
Gnide et Paphos réclament des guirlandes ?
Viens essayer, dit Vénus à son fils,
Qui de nous deux, sur le sein de Cybèle,
Aura cueilli la moisson la plus belle,
Entre cette heure et l’heure où le soleil
Vers l’horizon penche son front vermeil ;
Quand, moins ardent, son rayon se prolonge,
Et que des bois l’ombre à leurs pieds s’alonge. »

Vous, qu’il menace, ô Nymphes d’alentour,
Gardez-vous bien de défier l’Amour.

Il part ; l’Eurus dans sa course orageuse,
L’oiseau qui fuit de perfides réseaux,
Le papillon, l’abeille voyageuse,
L’insecte ailé qui brille sur les eaux,
Seraient moins prompts, moins agiles, moins beaux.
Impatient, il vole aux fleurs nouvelles ;
Du battement de ses rapides ailes
Le carquois d’or sur son dos retentit.
Déjà Vénus, qu’un sourire avertit,
Voit sur le sein de la verte prairie
S’amonceler la récolte fleurie.

Vous, qu’il menace, ô Nymphes d’alentour,
Gardez-vous bien de défier l’Amour.
 
Mais quel témoin de la lutte divine
Parut alors à travers les rameaux,
Que blanchissait la naissante aubépine ?
Ce front de lis paré de bruns anneaux,
Ces grands yeux noirs, dont la flamme mobile
De l’enfant-dieu suivait le vol agile,