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drais avoir des poules, pour être certain d’avoir des œufs frais à mon déjeuner ; vous pourrez ainsi m’en faire à la coque tous les jours. Dites à la marchande de m’en apporter six, et un beau coq, le plus beau qu’elle aura. Je vais prier Cramoyson de faire tout de suite un entourage avec du treillage en fil de fer à côté de la cabane au bois, assez grand pour que ces bêtes aient de l’herbe et de quoi picorer. »

Deux jours après, les poules arrivèrent avec un coq superbe, qui avait une crête remarquable et un cou tout doré.

Mon maître me recommanda d’en avoir bien soin, de leur faire des pâtées avec les restes de pain, du son et du lait. « Et moi, ajouta-t-il, je leur donnerai du petit grain. » Cramoyson en déposa un sac dans la cabane.


Plusieurs fois par jour, mon maître visitait ses poissons rouges, mais il aimait surtout s’attarder près de ses poules ; il ne se lassait pas de les regarder, observant leurs moindres mouvements et s’en amusant. Elles étaient, il faut le dire, fort belles, et le coq était encore plus rouge qu’à son arrivée.

« Est-il beau, me disait-il, ce gaillard-là ! Je voudrais être peintre, j’en ferais sûrement un tableau réussi… Voyez l’expression de sa tête. L’œil est-il assez fier ! Et sa belle crête d’un rouge vigoureux ! puis son col brillant, nuancé, il est étincelant ; et cette prestance majestueuse ! Regardez sa queue ; quel superbe panache ! Mais vous savez, en général, ils ne la gardent pas longtemps… Les œufs sont très bons, ils n’ont aucun rapport comme goût avec ceux de Paris. Vous direz à la marchande que pour le mois de juillet je lui demanderai