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point de vue, ce terrain vague, clos de planches noires espacées, que le soleil baigne à plaisir de ses rayons, cela lui fait l’effet d’un non-sens, d’une chose qui ne doit pas être. Pour cacher cette horreur ensoleillée, Monsieur se décide à mettre des rideaux de vitrage en toile verte, aux fenêtres. C’est bien adoucissant pour la vue, mais aussi cela rend l’appartement sombre et triste ! Il faut chercher à tâtons les objets dont on a besoin et l’on a toujours peur de casser quelque chose… Mon maître s’ennuie tellement dans ce logis qu’il est bien décidé à se remettre au canotage et il me dit : « Je vous emmène demain à Poissy où j’ai fait transporter mes bateaux ; car, à Chatou, ce n’était plus tenable, à cause du voisinage. Il y avait vraiment trop de demi-mondaines. Je le regrette pour Alphonse et Mme Papillon qui ont toujours été très gentils pour moi et qui prenaient grand soin de mes bateaux… Il est nécessaire que vous fassiez connaissance avec les propriétaires de l’Hôtel de l’Esturgeon et aussi avec le gardien de mes bateaux. »

À 5 heures du matin, il me sonne : « Êtes-vous prêt, François ? me dit-il, car il faut que nous prenions le premier train pour arriver à l’heure du déjeuner. » Nous partons… En arrivant à Poissy, mon maître alla chez le gardien de ses bateaux et le pria de venir immédiatement voir ce qu’il y avait à faire pour que tout fût en état dans quinze jours. En passant devant l’hôtel, il commanda le déjeuner.

Au garage, M. de Maupassant s’expliqua longuement avec le gardien, puis il m’envoya chercher un constructeur peintre. Enfin, tout étant bien convenu, nous revenons déjeuner, et il me dit : « J’ai vraiment bien fait de vous emmener ; ils sont peu intelligents et il faudra que nous venions de temps en temps, l’un ou l’autre… »