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fois de plus à ma bonne chère mère, que, hélas, je ne vois pas souvent, et ce tableau touchant de mon maître avec sa mère me donnait des envies folles de courir voir la mienne, l’embrasser et lui dire que je ne la quitterais plus jamais.

Monsieur raconte à sa mère son ascension à la Dent-du-Chat en compagnie d’une de ces Anglaises intrépides qu’on rencontre partout : « Comme nous glissions beaucoup, disait-il, nous nous servions de nos mains en guise de harpon et je t’assure que cela ne manquait pas d’intérêt… »

M. de Maupassant s’aperçut-il que j’étais triste, c’est très possible, car rien n’échappait à son œil observateur. Spontanément il me demanda si j’étais déjà monté au Revard ; je lui répondis que non. « Mais il faut voir ça, me dit-il. J’y vais cette après-midi, si cela vous plaît de venir avec moi, je vous emmène. » Je réponds : « Oui, Monsieur, je veux bien, mais à une condition, c’est que je ne serai pas obligé de suivre Monsieur au plus fort de la montée, — Eh bien, c’est entendu, soyez prêt à deux heures et demie, je vous mettrai sur la route, puis j’irai faire une visite à mon docteur. Pendant ce temps, vous pourrez prendre une bonne avance. »

Il fut fait comme c’était convenu. Mon maître m’a rejoint lorsque je tournais le dernier sentier pour arriver au sommet de ce mont. Nous nous mettons à marcher dans la direction du mont Blanc que nous voyons devant nous, ainsi que d’autres montagnes d’Italie et de Suisse. « Nous allons revenir de ce côté », me dit-il, en prenant sur sa droite, puis il m’indique où se trouve Chamonix, derrière des grands plis de montagnes :

« Vous ne pouvez vous figurer comme toute cette