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et son écurie, il voulut aller partout faire sa ronde, et sortit armé d’une hache. Barat qui l’entendit sortir profita de ce moment pour crocheter la porte ; et s’approchant du lit en contrefaisant la voix de Travers : « Marie, dit-il, le cochon n’est plus à la muraille, qu’en as-tu fait ? — Tu ne te souviens donc pas que nous l’avons mis sous la huche ! répondit la femme. Est-ce que la peur te trouble la cervelle ? Non pas, reprit l’autre, mais je l’avais oublié. Reste là, je vais le ranger. » En disant cela, il va charger le cochon sur ses épaules et l’emporte.

Après avoir fait sa ronde et bien visité ses portes, Travers rentra. « Il faut avouer, dit la femme, que j’ai là un mari qui a une pauvre tête ; il oublie depuis tantôt ce qu’il a fait de son cochon. » À ces mots Travers fait un cri. « Je l’avais annoncé qu’on me le volerait, dit-il ; adieu, le voilà parti, je ne le verrai plus. » Cependant, comme les voleurs ne pouvaient pas être encore bien loin, il espéra pouvoir les rattraper et courut après eux.

Ils avaient pris, à travers champs, un petit sentier détourné qui conduisait au bois où ils espéraient cacher leur proie plus sûrement. Haimet allait en avant pour assurer la marche et son frère, dont le fardeau ralentissait le pas, suivait à quelque distance. Travers eut bientôt atteint celui-ci. Il le reconnut, et prenant le ton de voix de l’aîné : « Tu dois être las, lui dit-il, donne que je le porte à mon tour. » Barat, qui croit entendre son frère, livre à Travers le cochon, et prend les devants. Mais il n’a pas fait cent pas qu’à son grand étonnement il rencontre Haimet. « Morbleu, dit-il, j’ai été attrapé. Ce coquin de Travers m’a